Les gorges du Verdon
Du hameau de Soleils, sur la commune de Trigance à Vinon, le Verdon fait office de frontière entre la façade nord du Var et les Alpes-de-Haute-Provence. Les deux départements se partagent d'ailleurs équitablement les trésors naturels et artificiels d'un site exceptionnel dont le Grand Canyon constitue indéniablement la perle rare. Ses gorges sont uniques et au fond d'elles coule un torrent impétueux aux eaux couleur vert émeraude. La gigantesque entaille creusée par le Verdon serpente sur une distance de 21 km en suivant un parcours sinueux à travers la roche. Au sommet des falaises, la largeur entre les parois varie de 200 à 1 500 m. Dans le creux des gorges d'une hauteur pouvant atteindre 700 m, le couloir se résume la plupart du temps au seul lit du torrent, soit moins d'une dizaine de mètres dans des goulets encombrés d'un chaos de blocs de pierre. D'un accès difficile, le grand Canyon n'a été exploré dans sa totalité que tardivement. Un spéléologue de renom, rompu à l'exploration des abîmes, Edouard Alfred Martel, a été le premier à l'avoir traversé de part en part, en août 1905, au terme de trois jours d'une expédition périlleuse.
De nos jours, les aménagements réalisés au fond et aux abords des gorges, notamment ceux du sentier auquel Martel a donné son nom et ceux du sentier Vidal, offrent des possibilités de randonnées inoubliables à tous points de vue. Outre ce joyau à découvrir en voiture, à pied ou au fil de l'eau pour les plus téméraires, le pays du Verdon, dont les limites géographiques (180 000 hectares) ont été officiellement redessinées en mars 1977, lors de la création du Parc naturel régional, dispose d'un patrimoine naturel hors du commun. En amont des Gorges, dans la partie septentrionale du Parc, les hautes terres du canton de Comps sont jalonnées de villages perchés entre le ciel et la forêt. Dans ce décor montagneux où les terres boisées alternent avec des vastes espaces arides, l'horizon est borné par les silhouettes étranges des chapelles templières, des oratoires et des châteaux. A Bargème, le plus haut village du Var, les ruines du château des Pontevès surplombe les quelques maisons d'un bourg qui défie le temps. Site classé, ce superbe ensemble médiéval est actuellement en cours de restauration. Chaque été, des pans de l'édifice sont patiemment remontés par des jeunes qui consacrent leurs vacances à la sauvegarde du patrimoine. A Trigance, la forteresse bâtie au XIè siècle surveille toujours l'accès à la vallée du Jabron. Des oriflammes flottent sur les quatre tours rondes d'un château-fort transformé en relais gastronomique. Des légendes relayées par des ouvrages au contenu pour le moins douteux prétendent que le fameux trésor des templiers serait enfoui quelque part dans un secteur compris entre Comps, le camp militaire de Canjuers (35 000 ha), les Gorges du Verdon et les contreforts du mont Lachens. Certains indices le situent dans l'enceinte de la commanderie templière de Valcros au Bourguet, d'autres à Bargème, Trigance, Brenon ou Châteauvieux, mais qui sait ? peut-être repose-t-il définitivement englouti sous les eaux du lac de Sainte-Croix ? A défaut d'avoir révélé sa cachette, la plus vaste des retenues du Verdon aura néanmoins considérablement modifié le paysage économique d'une région à laquelle les étendues d'eau, prisonnières des barrages EDF, ont apporté une indiscutable source de vie supplémentaire. Avec le temps, les retenues successives de Sainte-Croix, Quinson, Esparron se sont parfaitement intégrées au site. Elles forment une sorte de prologement logique aux hautes et aux basses gorges du Verdon. Dompté par cinq ouvrages d'art, deux barrages dans les Alpes-de-Haute-Provence et trois dans le Var, le torrent y a certes perdu de son caractère impétueux. En contre partie, il a gagné une dimension esthétique et touristique qui lui valent aujourd'hui d'avoir les attraits d'une véritable mer intérieure. L'image du village de Bauduen dont les vieilles demeures provençales se reflètent dans les eaux du lac de Sainte-Croix est l'illustration la plus parlante d'une métamorphose qui s'opère progressivement en profondeur sur tout le territore du Parc naturel régional.
Complément : Dompté par cinq barrages, jalonné de sentiers qui ont été aménagés de manière à permettre le franchissement des passages délicats, le Verdon n'en reste pas moins un site de randonnée répertorié comme pouvant être dangereux. Avant d'entreprendre une excursion au fond des gorges, il convient toujours de se renseigner en contactant les gendarmeries compétentes, les offices de tourisme ou en téléphonant au répondeur spécial mis en place par EDF. Les délestages opérés au niveau des barrages situées en amont des gorges ainsi que les violents orages modifient le débit et le niveau du torrent. Pour les circuits pédestres, il est recommandé de bien s'équiper, d'avoir de bonnes chaussures de marche, de ne pas partir seul et encore moins accompagné de jeunes enfants ou de chiens. En ce qui concernent toutes les pratiques sportives dites "extrême" (rafting, canyoning, floating, hydrospeed...) mieux vaut faire appel aux guides spécialisés.
Source : Couleurs du Var - Morceau choisis - Ed. Conseil genéral.