Etude sur les noms de famille de la Garde-Freinet
Mes ancêtres en lignée patronymique, les Barret, patronyme orthographié Berret en remontant les siècles, venaient de Collobrières au XVe siècle puis se sont installés à la Garde Freinet au cours du XVIe siècle. Ils sont ensuite partis faire souche au Muy vers la fin du XVIIe siècle, et bien qu'ils s'en défendent, tous les Barret du Muy actuels sont parents entre eux à une génération ou à une autre qu'ils le veuillent ou pas.
Tout d'abord un petit aperçu de l'histoire de ce village
La Garde-Freinet (La Gàrdia en provençal) en est une commune située dans le département du Var et la région Provence-Alpes-Côte d'Azur. Les habitants se nomment : les Gardois ou Gardiòu en provençal.
Au IXe siècle : Traditionnellement, on localise le lieu d'implantation des Sarrasins en Provence occidentale dans les années 890 à la Garde-Freinet. Ce lieu est aussi évoqué sous d'autres patronymes dont celui de Fraxinet ou Fraxinetum. L'histoire rapporte que c'est le comte de Provence Guillaume Ier dit le Libérateur qui chasse les Sarrasins en 973 après sa victoire à la bataille de Tourtour.
Philippe Sénac, dans son livre : "Histoire de l'Islam et des musulmans en France du Moyen-Age à nos jours", s’appuie sur les sources arabes et les données de l’archéologie. Il montre combien le Fraxinet, ne constituait pas un simple repère de brigands mais un emplacement stratégique pour les musulmans qui semblaient vouloir "entraver les relations entre les cités marchandes italiennes et le reste de la chrétienté méridionale".
Au XIIe siècle : A 450 m d'altitude, on découvre le Fort Freinet (XIIe au XVIe siècles) et les vestiges d'un ancien village fortifié du moyen-âge, constitué d'une trentaine d'habitations taillées dans la roche. Ils dominent le massif forestier des Maures sur la voie reliant la vallée de l'Argens et le golfe de Saint-Tropez. Actuellement des fouilles archéologiques ainsi que des restaurations par des bénévoles sont en cours afin de connaître et préserver ce patrimoine. Ce fort stratégique, classé monument historique, servait à contrôler le passage entre la vallée du Vidauban et le Golfe de Grimaud. Une grande fosse servait de réservoir d'eau.
Au XIIIe siècle : Les habitants s'installent sur le col de la Garde. Le bourg devient : "La Garde du Freinet".
Au XIXe siècle : L'industrie du bouchon de liège se développe avec près de 700 bouchonniers grâce à la forêt de chênes-liège. A cette époque, la production de marrons et de magnans (vers à soie) est également bien développée.
En 1900 : L'abbé Mathieu dresse la croix des Maures (altitude 437 m) qui sera restaurée en 1978 car très endommagée. Le Christ pesait 175 kg. Consacrée le 3 mai 1900 (jour de la sainte Croix et de Saint Clément, patron du village), la Croix et son effigie du Christ sont l’un des emblèmes du village qui s’étale à ses pieds. Haute de 6 mètres, on dit que son commanditaire l’abbé Mathieu l’aurait placée exprès dans l’axe de la place Neuve. Il répondait ainsi au climat anticlérical de l’époque, et visait plus particulièrement le propriétaire athée de la plus imposante maison du village. La tradition affirme que le clerc aurait lancé à son ennemi : “Jusqu’à la fin de tes jours tu auras le Christ en face de toi !”. Le monument avait également une fonction moins spirituelle : il servit de paratonnerre au village pendant des années, avant que la rouille n’en vienne à bout.
La croix des Maures (Photo internet)
A présent, l'étude proprement dite mais tout d'abord une précision : vous verrez que je parle de féminin au niveau des noms. Il faut savoir que partout en Provence sous l'Ancien Régime (avant la Révolution), les noms de famille des femmes étaient féminisés. C'était la coutume. Et dans les actes, les femmes gardaient leur nom de jeune fille. Par exemple : Arnaud était Arnaude, Barret, Barrette ou encore Sénéquier, Sénéquière. On parlait de Marguerite Sénéquière alors que son père était Antoine Sénéquier. Et parfois la féminisation devenait compliquée quand on essayait de mettre un patronyme au masculin. Par exemple, Honorade Beufve est la fille de Jean Beuf. Elisabeth Fabresse est en fait Elisabeth Fabre alors que son frère s'appelle Michel Fabre et que sa soeur est Marie Fabresse. Anne Taxilesse est la fille de Joseph Taxil.
- ARNAUD (féminin Arnaude) Nom de baptême c'est-à-dire, prénom. Du germain arn (aigle) et wald (gouverner). La famille Arnaud est présente à la Garde Freinet au XVIIe siècle, probablement avant.
Pour ma part, mes Arnaud gardois les plus anciens viennent des Arcs. Jean Arnaud, originaire des Arcs (sur Argens) est le père de Pierre qui se marie avec Honnorade Sénéquier à la Garde Freinet le 26 janvier 1644.
- BARRET ou BERRET (féminin Barrette) Nom de famille attesté au XVIe siècle. La plus ancienne forme que j'ai retrouvée est Berret. Viendrait de barri : rempart. Il y a aussi des Barret ou Baret dans les Bouches-du-Rhône.
- BERARD (féminin Bérarde) Nom de baptême. Du germain ber (cas sujet), ours et hard : fort. La famille Bérard est citée à partir du XVIIe siècle.
- BERENGUIER ou BRENGUIER (féminin Bérenguière ou Brenguière) Variante méridionale de Béranger. Nom de baptême. Du germain beren : ours et gari : lance.
- BERNARD (féminin Bernarde) Nom de baptême. Du germain bern (cas régime) et ours et hard : fort.
- BERTRAND (féminin Bertrane) Nom de baptême. Du germain berth : illustre et hramn : corbeau.
- CAUVIN (féminin Cauvine) Surnom. Forme méridionale de chauve. Deux possibilités : soit homme chauve, soit habitant d'un endroit dénudé. Idem pour Chauvin, Chalvin, Calvin, Calvy, Cauvy qui veulent tous dirent la même chose.
- CHAIS ou CHAIX (féminin Chaisse) Sobriquet. De l'occitan : mâchoire. L'homme aux mâchoires fortes.
- COLLE (féminin Collesse) Colline en provençal (Coualo). En 1763 est cité Pons Colle par exemple.
- COULET (féminin Coulesse ou Coulette) Nom de lieu : petite colline. Famille Gardoise au XIXe siècle. J'ai des Coulet également aux Arcs (sur Argens) au XVIIe siècle, ils venaient de La Mûre dans les Alpes-de-Haute-Provence.
- CONDROYER ou CONDROIER (féminin Condroyère) Nom de métier. Variante méridionale de coroier : celui qui organisait les déplacements de troupes ou les cérémonies (qui prenait conroi : prendre soin de, au sens de être adroit à éluder un péril). Je pense aussi qu'on peut le rapprocher du métier de corroyeur : Préparer une matière en la battant, en l'étirant, en la foulant. Transformer (le cuir) après le tannage, en lui donnant la souplesse, la couleur, le grain, le dernier apprêt requis pour ses divers usages. Corroyer le cuir ; corroyer des peaux.
- COURCHET ou CROCHET (féminin Courchette) Surnom : déformation de crochet. Ou du vieux provençal acorchar, devenu courcha : raccourcir avec le sens de petite taille. C'est l'un des plus vieux noms de la Garde Freinet.
- CROTE ou CROTTE (féminin Crottesse) Nom de domaine devenu nom de famille. Crotte : grotte. En provençal, une crotte est aussi une cave. Pour grotte, on utilise plutôt le mot baume. A Trans, nous avons une rue des Baumes, c'est un quartier où il y a beaucoup de grottes creusées dans le tuf.
- DAUMAS (féminin Daumasse) Nom d'origine. Habitant du mas. Idem pour Dumas ou Delmas.
- FABRE (féminin Fabresse) Nom de métier. Forme occitane de fèvre : forgeron, maréchal-ferrant. C'est idem pour Favre, Fèvre, Lefèvre, Lefebvre, etc...
- GIRARD (féminin Girarde) Nom de baptême. Déformation de Gérard. Du germain ger, gari : lance et hard : fort. En 1635 est cité Honoré Girard trésorier de la communauté. C'est comme Giraud, Géraud, Gérauld, Géraut, etc...
- GIRAUD (féminin Giraude) Nom de baptême. Dérivé de Géraud. Du germain ger, gari : lance et walden : gouverner.
- GUIGUES (féminin Guiguesse) Surnom, prénom. Du germain wig : combat. Famille étendue au XVIIIe siècle. Guigues est aussi Guigonnet.
- GUILLABERT : (féminin Guillaberte) Nom de famille. Formé à partir du nom de baptême Guillaume. Du germain wil : volonté, helm : casque et berth : célèbre.
- INFERNET ou ENFERNET (féminin Infernette) En provençal, l'Infernet est un lieu tourmenté, sec et venté, difficile d'accès, montagne ou vallon. On trouve les deux formes du nom à la Garde Freinet, avec un "i" ou avec un "e".
- JAUFFRET (féminin Jauffrete) Forme de Geoffroy. Nom de baptême. Origine germanique gaut : dieu et frid : paix. Famille citée au XVIIe siècle. Jauffret pouvait être orthographié Geoffroy, Gerffroy, Jaufret, Gerfrey, Jeoffroy, etc... Je l'ai vu écrit sous toutes ces formes dont quatre fois de façon différente dans un même acte !
- LAUGIER (féminin Laugière) De Augier. Du germain adal : noble et gari : lance. C'est la même forme que Lagier. En 1718 est cité Jean-Marc Laugier trésorier de la communauté.
- LAVAGNE (féminin Lavagnesse) De lavagno : mare, eau douteuse, lavasse. Les Lavagne de la Garde-Freinet faisaient tous partie de la même famille, il venaient d'Entrecasteaux. Puis au fil des générations ils sont allés s'installer aux Arcs (sur-Argens), ensuite à Figanières et enfin à La Motte. C'est Esprit Lavagne fils d'Honoré qui se marie à la Garde Freinet le 8 janvier 1686 avec Thérèse Sénéquière. Mon arrière-grand-mère était Marie Joséphine Lavagne. Elle était née le 30 avril 1880 à La Motte. Les Lavagne sont allés s'implanter au cours des siècles au village de La Motte (à 5 km de Trans) et y ont fait souche. Les familles Lavagne de La Motte sont toutes parentes entre elles. Je remonte les Lavagne sur Entrecasteaux jusque vers 1550 avec mon plus viel ancêtre de cette lignée : Jaume Lavagne marié avec Catherine Bech vers 1550.
- LOMBARD (féminin Lombarde) Nom d'origine. Au Moyen Age était donné à tout Italien du nord. Puis surnom donné aux banquiers ou usuriers parce que telle était souvent la profession des immigrés lombards. Ce nom est très répandu en Provence.
- LONJON ou LONGEON (féminin Lonjonne). La souche de ce nom se situe dans le village des Mayons proche de la Garde Freinet. On y trouve aussi Nonjon variante de Lonjon. A l'origine, les Lonjon étaient des Nonjon. C'est une erreur de phonétique qui a engendré les deux orthographes. J'ai vu écrit aussi Lonjeon ou Nonjeon. C'est un des plus vieux noms des Mayons.
- MARTEL (féminin Martelle) Nom de métier. A l'origine, celui qui maniait la masse d'armes, puis celui qui maniait le marteau : forgeron. Martel est parfois écrit Marteau. Les noms en "el" finissent aussi en "au". Comme par exemple, le village de Taradeau nommé aussi Taradel ou le nom de famille Taradel (de Roquebrune-sur-Argens). Jean Bertrand du lieu de Taradel : Taradeau.
- MARTIN (féminin Martine) Nom de baptême. Martin est un nom très présent à Saint-Tropez et de partout en Provence. C'est le premier nom de famille actuellement le plus répandu en France.
- MAUREL (féminin Maurelle) Sobriquet dérivé de maure : brun de peau. Noir de cheveux étant désigné par Brun ou Lebrun. Aussi Maure, Maurin, Maureau, Moreau, et autres graphies...
- MASSEL (féminin Masselle) Nom de métier : celui qui se servait d'une masse d'armes.
- MONIER (féminin Monière) Parfois transcrit Maunier, Mounier ou Monié. Nom de métier : meunier. Il y a aussi beaucoup de Maunier à Lorgues. Remarque : A Lorgues, le nom est écrit Maunier, tandis qu'à la Garde Freinet, c'est Monier ou Monnier.
- OLIVIER ou OLLIVIER (féminin Olivière) Nom de baptême. Un des plus vieux noms de la Garde Freinet et des villages des environs. Mon arrière grand-mère Adélaïde Ollivier était originaire de Roquebrune-sur-Argens. Elle s'était mariée au Muy le 6 octobre 1890 avec François Barret (mon arrière-grand-père). Mais en remontant le temps, son plus vieil ancêtre Peyre (Pierre) Ollivier qui se marie le 15 août 1602 avec Jaumette Brunelle (Jaume, forme provençale de Jacques) était le fils de Guilhem (forme de Guillaume) et de Catherine Perrine de la Garde Freinet.
- PELISSIER ou PELLISSIER (féminin Pélissière) Nom de métier : pellettier. Ou surnom : porteur de pelisse. Les Pelissier de la Garde Freinet venaient de la Martre.
- PERRIN (féminin Perrine) Surnom. Diminutif affectueux de Pierre. On trouve de très nombreux Perrin à la Garde Freinet.
- POULAS ou POLAS (féminin Poulasse) Gros poulet. Famille gardoise encore répandue aux XVIIe et XVIIIe siècle. Mes Poulas sont venus de Saint-Tropez au début XVIIe siècle.
- PREIRE ou PRAIRE (féminin Preiresse) Sobriquet ironique : prieur, prêtre en provençal. En 1613, est cité Pierre Preire. Preire est également un vieux nom du village de Trigance.
- RAYMOND ou RAIMOND ou RAIMON (féminin Raimone) Anciennement Reimoun. Nom de baptême. Raimbaud à l'origine. Du germain ragin :conseil et bald : audacieux.
- ROUX (féminin Rousse) Sobriquet dû à une particularité physique : les cheveux roux.
- SAUVAN (féminin Sauvane) Nom de baptême = Silvain.
- SENEQUIER (féminin Sénéquière) Sobriquet provençal. Du latin : sénestre : Qui est à gauche.
- SERRET (féminin Serrette) Nom de lieu. Vient de serre : montagne allongée.
- SIGALAS ou SEGALLAS ou SEGELLAS (féminin Sigalasse) Surnom de cultivateur, vient de seigle.
- TAXIL ou TAXY ou TASSY (féminin Taxilesse) Frédéric Mistral propose pour origine la famille romaine Taxilus. Le tassier est aussi la repousse de châtaignier qui a donné le patronyme provençal Tassi ou Tassy. Il y a également des Taxil à Trans en Provence ainsi qu'au Muy.