La justice criminelle au XIVème siècle
La Justice en ce temps là était féroce et répressive. Elle punissait tout manquement à l'égard de Dieu, du roi et de la collectivité. Son exercice était pensé comme un sacerdoce. La procédure inquisitoriale avait remplacé l'ancienne, accusatoire. Elle débouchait parfois sur la "question" : l'instruction avait recours à la torture par un bourreau attitré, dans les cas où le prévenu niait les faits qui lui étaient reprochés. Par exemple, le "flammage" ou "lardage" : le bourreau faisait couler sur la peau du "questionné" du lard brûlant à partir de brochettes enflammées. Ainsi, en 1340, le juge dracénois Jean Belhomme fit larder, le 15 décembre, Hugo Thesacius de Fayence et Pierre Jehan de Bargemon, soupçonnés de sorcellerie, le bourreau réclamant 1 sou et 4 deniers coronats pour 3 livres de lard, et deux autres encore le 20 décembre, Anthoine Mothe, de Draguignan et Pierre Rostan de Fayence. Les peines ne comportaient pas l'emprisonnement, qui était un luxe réservé aux têtes couronnées, de même que la décapitation, mais le bannissement, ou, dans les cas les plus graves, des condamnations qui se voulaient exemplaires et dissuasives.
L'immersion : En 1337, Rostan Graulias de Draguignan et Bonet de Comps, furent exposés au pilori, portant au cou le motif de leur peine, puis enchaînés (ou enfermés dans une corbeille) et plongés trois fois dans la fontaine-abreuvoir de la place du Marché. Coût : 5 sous coronats.
L'amputation : En 1341, Jean André, meurtrier d'un homme, était mené à la pendaison sur la place du Marché. Audibert Feutrier jeta des pierres au viguier chargé de l'exécution et tira son couteau pour couper les liens du condamné. Sentence : amputation du poing droit (la plaie était cautérisée au fer rouge par le bourreau). En 1642, Gaufridi Blanc, charpentier de Salernes, déjà marié à Salon (Salon-de-Provence) avait épousé une Catherine à Draguignan. Il fut condamné à l'amputation de la main gauche.
La pendaison : En 1338, Pierre Gantelme de Draguignan, qualifié de multiple voleur, fut pendu par le col aux Fourches royales. Habituellement, la pendaison se faisait en public, sur la Place, puis le cadavre était re-pendu, pour un maximum de visibilité, sur un haut lieu, au bord de la grand-route : les Fourches (actuel col de l'Ange).
La noyade : En 1327, Jacques de Nice, de Grasse, qualifié de voleur, meurtrier et ravisseur de vierges, fut condamné par le juge dracénois Raymond d'Apulie à être enfermé dans un sac et noyé dans la Nartuby. Le bourreau pour son service et l'apothicaire Jean Veyrier pour la toile, les cordes... réclamèrent 18 sous, 1 denier et 10 oboles.
A ces quelques exemples, il faut rajouter le supplice de la fustigation (fouetter au sang) pour les adultères, l'arrachage avec des tenailles ou le percement au fer rouge de la langue pour les blasphémateurs ou les faux témoins, tel le dracénois Petiton en 1337, l'essorillage (couper les oreilles) pour un vol de faible importance et autres joyeusetés. Faire appel de ces décisions était certes possible mais rarement fait car quelles étaient leurs chances d'être recevables ?
Source : D'après un texte de Pierre-Jean Gayrard dans "Draguignan, 2000 ans d'histoire" - Ed. de L'Aube Sud.