Bienvenue chez moi à Trans en Provence dans le Var. Je vous invite à la découverte de la Provence et du Var en particulier à travers son histoire, son patrimoine, ses traditions, ses coutumes, ses légendes, etc...
"J'aime ce pays et j'aime y vivre parce que j'y ai mes racines, ces profondes et délicates racines qui attachent un homme à la terre où sont nés et morts ses aïeux, qui l'attachent à ce qu'on pense et à ce qu'on mange, aux usages comme aux nourritures, aux locutions locales, aux intonations des paysans, aux odeurs du sol, des villages et de l'air même." (Guy de Maupassant-Le horla)
Image extraite du film : "La gloire de mon père" de Marcel Pagnol.
"Bon bout d'an" et à "l'an que vèn" sont deux expressions que l'on utilise à la fin de chaque année à partir de la Noël. "Bon bout d'an" signifie : bonne fin d'année et à "L'an que vèn" signifie : "à l'année qui vient (à l'année prochaine)". Cette dernière expression est souvent suivie de "Se sian pas mai, que siguen pas men". Donc, on souhaite : "A l'an que vèn, se sian pas mai que siguen pas men" : "A l'an qui vient et si nous ne sommes pas plus que nous ne soyons pas moins", en référence aux naissances et aux décès dans chaque famille.
Dans le Var, les maisons de campagne ne sont pas désignées comme des mas mais comme des bastides, des ménages, des "oustau". L'habitation d'un paysan, malgré l'évolution rapide des mœurs après la dernière guerre, s'est peu transformée, extérieurement tout au moins. Le progrès est entré dans la cuisine mais beaucoup de bastides sont restées telles qu'au siècle passé, d'autres sont à l'état de "casau" (masure abandonnée) que l'on trouve dans les vallons et dont ne subsiste souvent qu'une partie des murs recouverts de lierre. Sur le devant pousse un vieux figuier ou d'antiques mûriers, parfois deux ou trois cyprès un peu funèbres mais typiques du paysage provençal (le nombre de trois était signe d'hospitalité). L'habitat, selon les périodes, se déplace car l'insécurité poussait à se réfugier en hauteur derrière les murailles et les remparts de défense autour des châteaux qui étaient plus sécurisants que l'isolement dans la campagne. Au village, en raison du manque d'espace, les maisons sont serrées les unes contre les autres, sont hautes, sur deux ou trois niveaux et assez austères. Le rez-de-chaussée comporte une remise, on accède au premier étage par un escalier raide d'une seule volée, et comporte la cuisine et une seconde pièce souvent sans fenêtre "la chambre soume" (sombre). Au deuxième niveau, on trouve une grande chambre et un grenier ou fenière (fenil). Sur le palier caché par un rideau l'indispensable seau hygiénique. Quand la sécurité fut à peu près certaine au XVIIIème siècle, la population eut le désir d'espace, besoin d'air libre et les villageois construisirent alors dans la plaine ou les vallées, des "ménages" c'est-à-dire, des maisons groupées en hameaux et entourées d'un jardin, potager ou verger au milieu des terres appartenant aux habitants de la maison. Nombre de ces ménages sont, de nos jours, en ruines couverts de lierre et de ronces. Du temps où ils étaient habités, à l'ombre fraîche d'un figuier ou des mûriers taillés en ramade, on mangeait dehors au frais. Il y avait un puits duquel on tirait l'eau avec un seau pendu par une grosse chaîne à un réa grinçant. Cette eau irisait le pastis fabriqué à la maison avec de l'eau de vie et de l'anis blanc auquel on ajoutait un petit verre de Fernet Branca, quelques feuilles d'absinthe et un peu de sucre. La bastide est massive, les murs épais, en pisé ou terre argileuse mêlée de chaux et de cailloux. La porte est basse, les fenêtres inégalement percées, fermées l'été pour empêcher la chaleur d'entrer (toutes les ouvertures sont petites par économie et besoin de fraîcheur). Jamais il n'y en a sur la face nord, la façade principale est toujours tournée au midi, sur certaines on a peint un cadran solaire pour lire l'heure. Les toitures couvertes de tuiles canal demi-rondes ou trapézoïdales sont à faible pente pour minimiser la prise du mistral. On posait dessus de grosses pierres car il arrivait qu'elles s'envolent arrachées par les terribles bourrasques de vent. Le rez-de-chaussée est occupé par l'écurie, l'étable, la cave ; souvent sans fermeture, on y abrite les gros outils, les araires, herses, sulfateuses, échelles... A côté, la lourde porte de l'appartement n'est presque jamais fermée, un rideau de toile de jute en interdit l'entrée aux mouches. Un sombre corridor va jusqu'au pied de l'escalier desservant l'étage, le sol est carrelé en pieds carrés en argile plus ou moins teintée.
Sur un côté, une grande cuisine servant de salle où l'on prend les repas, est au cœur de la maison. Dans l'âtre d'une immense cheminée brûlent tout le jour et toute l'année de grosses bûches ; le soir on couvre les braises avec des cendres et le matin on les retrouve encore chaudes quand on y jette une gavelle (fagot de sarments secs). Les flammes renaissent et lèchent joyeusement le chaudron de fonte pendu au "crémasclé" (la crémaillère). La soupe y cuit pendant des heures, elle a d'ailleurs toujours un petit goût de fumée. Un "potager" aux carreaux rouges vernis et usés, garni d'un gros tian d'argile cuite dans lequel on fait la vaisselle avec l'eau amenée du puits dans les seaux de fer galvanisés ou des cruches en poterie vernie. Devant l'âtre, on fait le samedi des ablutions assez sommaires. Les murs et les plafonds hauts patinés par la fumée sont passés au lait de chaux de loin en loin, les poutres en chêne équarries grossièrement sont blanchies en même temps. Des papiers gluants de miel sont pendus au plafond pour attirer les mouches qui s'y collent. Une longue table tient le milieux de la pièce, parfois elle est recouverte d'une plaque de zinc, cela économise la toile cirée et le nettoyage est plus facile. La bouteille de vin y siège en permanence. Le couvert est mis : des assiettes profondes et sans rebords, genre écuelles pour la soupe, des couverts de fer rétamés une fois par an, tout est simple. Le soir, la lampe à pétrole ou à huile anime la maison. Le domestique, quand il y en a un, s'assoie à cette table avec les maîtres, et part ensuite coucher à la fenière, où il monte bien souvent par une échelle, il dort enroulé dans une simple couverture. Beaucoup de cadets de familles paysannes se plaçaient ainsi, des garçons ne possédant rien ou ayant mené une vie déréglée, démunis de tout, venaient demander dans les fermes du travail et un abri, parfois c'étaient des trimardeurs à qui l'on ne demandait rien, que leur nom, ils y demeuraient parfois jusqu'à leur mort.
L'hiver, devant l'âtre, à la lumière du feu on veillait, les femmes tricotaient chaussettes ou couvertures de coton blanc, les hommes bavardaient. On monte l'escalier raide pour aller aux chambres et à la magnanerie. Les plafonds sont faits de canisses enduites de plâtre épais. On s'éclaire à l'aide de petites lampes à huiles au corps de verre, au ventre rempli d'huile, surmontées d'une mèche brûlant avec une flamme vacillante, souvent c'était à la bougie qu'on s'éclairait dans les chambres où l'on n'allumait jamais le feu. On emportait une tomette, un fer en fonte ou simplement un gros caillou chauffé dans l'âtre, enveloppé d'un chiffon, et on le plaçait au fond du lit, et pieds chauds, on dormait très bien. Le lit ne comportait qu'une paillasse posée sur des planches. Dans les maisons proches du rivage, le varech remplaçait la paille. Dans la chambre du maître de maison, sur la table de toilette trônent une cuvette et un broc de faïence fleuri, qui ne servent que de décor, puisqu'on se débarbouille à la cuisine. Sur la commode rustique, un bouquet de fleurs d'oranger de la mariée protégé par un globe de verre. De chaque côté, un vieux daguerréotype fané dans un cadre de bois taillé à la main. Au chevet du lit, un crucifix, un brin de buis ou d'olivier béni, le cierge de la Chandeleur éléments qui constituent une protection contre les misères de la vie. Une garde-robe à deux portes en bois fruitier, deux chaises et c'est tout ! Mais si le plancher est carrelé de tomettes rouges, la provençale aura à cœur de l' entretenir bien ciré. Il y a toujours quelques cafournons (pièces sombres) pour servir de débarras. Sur le palier est placé un seau hygiénique dont on jette chaque jour le contenu dans la suie (fosse à purin) derrière ou à côté de la maison. cette fosse recueille tous les déchets et tous les excréments humains, animaux, mêlés à la paille des litières, tout cela donnait un bon engrais, le seul, qu'on dit biologique maintenant.
Au fond du jardin, une cabane de planches dans laquelle une petite estrade sert de "cagadou" dans la journée, une jarre d'argile reçoit les déjections et souvent ce n'est seulement que de la sciure de bois qui couvre le sol. La vie se déroulait bien simplement dans ces bastides perdues.
Source : D'après le livre "Les Maures, terre de Provence" de Georgette Brun-Boglio - Les Presses du Midi à Toulon
Exposition du 4 au 18 août 2024 aux Arcs-sur-Argens préparée et présentée comme chaque année par Jean-Michel Soldi. Elle commémore le 80ème anniversaire de la Libération de la Provence. Cette exposition s'intitule : "1942-1944, de la Résistance à la Libération". Elle sera visible à l'espace J.-C. Hugony, place du 11 novembre. Vous pourrez y voir notamment un authentique planeur américain Waco CG-4A.
Il était une fois sur la rive droite du ravin, à Moustiers (Alpes-de-Haute-Provence), au quartier des Baumettes, le sire de Pena, baron de Moustiers qui était le tuteur de la belle Aloïse. De l'autre côté du pont, c'était "le faubourg" et le père du jeune chevalier nommé Bozon en était le seigneur.
Or, un beau jour, la pure et chaste Aloïse, rencontra Bozon et éprouva un sentiment inconnu en le voyant, sentiment troublant qui fit soulever l'albâtre de son sein, pâlir son visage et troubler sa vue. Bien entendu, le coup de foudre fut réciproque et le jeune Bozon ne tarda pas à déclarer la passion qui remplissait son âme, et les vœux ardents qu'il adressait au ciel pour obtenir la main de la belle Aloïse. Tout semblait aller pour le mieux dans le meilleur des mondes, mais hélas, à ce coup de foudre succéda bientôt un coup de tonnerre. Les parents des deux amoureux, qui ne s'aimaient guère, poussés par on ne sait quels intérêts ou vieilles rancunes tenaces, se déclarèrent la guerre. Et comme le père de Bozon était trop vieux pour combattre, c'est Bozon lui-même qui fut désigné pour porter le glaive contre celui qui aurait pu être son beau-père. Bozon eut beau refuser l'honneur qui lui était fait de prendre le commandement d'une coalition de petits seigneurs locaux, petits mais cependant, tous de vaillants guerriers, pour l'assaut contre leur suzerain honni. Le baron de Moustiers son père et les autres chevaliers furent inflexibles. Contre son gré, Bozon dut alors se résoudre à prendre le glaive contre le camp de sa bien-aimée. Lorsqu'elle apprit la chose, la belle s'évanouit dans les bras de sa nourrice. C'est alors que les hostilités commencèrent. "Déjà sous le disque sanglant de la lune, à la lueur des torches enflammées, on voyait les chefs et les soldats s'avancer avec furie des deux côtés de Moustiers. La fougueuse impatience qui les dévorait ne leur avait pas permis d'attendre jusqu'au lendemain. Déjà le glaive du carnage était tiré, le sang ruisselait dans les rues et des cris perçants ou des imprécations féroces pouvaient parvenir jusqu'à la chapelle des rochers. Vainqueur ou repoussé tour à tour, chacun des deux partis s'animait mutuellement d'une nouvelle furie, et frémissait de la résistance qu'on osait lui opposer... A chaque victime qui succombe sous le fer meurtrier, des hurlements de joie, ou des plaintes des blessés font retentir la vallée, les remparts et les rochers de l'ermitage." Aloïse revenue à elle, dominée par sa passion et n'écoutant que son courage, descendit alors sur le lieu de la bataille, au milieu des combattants, près du pont de bois, cherchant Bozon.
"La rage des assaillants était devenue si violente en ce moment, que l'infortunée Aloïse ne fut aperçue d'aucun des guerriers." Une flèche, décochée par on ne sait quel parti, lui transperça la poitrine. Elle tomba et fut aussitôt foulée aux pieds des chevaux et des soldats. Même le ciel s'en mêla : "En ce fatal moment, un orage épouvantable éclatait avec impétuosité. Un craquement horrible semblait fendre les rochers du haut en bas. Les éclairs en sillonnaient les crevasses et répandaient une clarté sinistre sur cette scène de douleur. Le bruit prolongé du tonnerre retentit en affreux mugissements ; il se mêle aux bruits des armes ; les échos les répètent, et des torrents d'eau noirâtre s'échappent des nombreuses cavités de la montagne." Grimpé sur un rocher pour mieux observer le champ de bataille, Bozon vit le pont de bois s'écrouler sous l'assaut des eaux et le corps d'Aloïse emporté par le courant. Le courageux chevalier, n'hésitant pas une seconde, voulut se jeter à l'eau, après s'être débarrassé de son casque, de son épée et de son bouclier. Mais un javelot tout aussi aigu que perfide l'atteignit, brisant net son élan. Pendant ce temps là, devant la violence de la tempête, les soldats s'étaient dispersés. Plusieurs d'entre eux s'étaient aperçu du même coup, qu'il avaient horreur d'égorger leurs concitoyens. D'autres, désertant le combat, se partageaient avidement le butin dont ils s'étaient emparés. Peu à peu, l'arène sanglante était devenue presque déserte. C'est alors que le vaillant Blacas arriva. Frère d'armes de Bozon, il le prit dans ses bras et recueillit les dernières volontés du mourant : "O Blacas, cher Blacas ! Promets-moi de réunir mon corps à celui de mon Aloïse". La fin de la bataille fut marquée par un phénomène singulier : l'air sembla retrouver sa sérénité première, la nature reprit sa touchante harmonie et, ô miracle, le flot impétueux s'interrompit, permettant à nouveau le passage de l'une à l'autre rive et remédiant ainsi à la destruction du pont. Blacas se rendit aussitôt en ambassade auprès du terrible baron de Pena, tuteur de la défunte Aloïse, pour lui faire part de sa requête du tout aussi défunt Bozon. L'intraitable baron refusa et, au contraire, donna l'ordre que chacun des deux corps soit déposé, l'un au sommet du baou (Nota de Nadine : un baou est une falaise, une colline ou un escarpement qui possède souvent un sommet plat (Cf. Wikipédia)) qui domine Moustiers, l'autre sur la cime du baou opposé, celui qui surplombe le faubourg, les séparant de cette façon pour l'éternité. Le plus curieux dans cette chronique désolante, c'est qu'on fit graver sur le marbre du tombeau d'Aloïse : "Rose naissante, tu n'as pas pu t'épanouir !" La fin de l'histoire n'en est pas moins étonnante : un matin, au moment où les premières lueurs de l'aurore ramènent dans les champs les laboureurs et les bergers, parut tout à coup à leurs yeux une chaîne immense qui réunissait les deux tombeaux, et à laquelle était attachée comme par enchantement la comète embrasée, symbole de la flamme éternelle qui anima le coeur d'Aloïse et de Bozon. "On assure que, sur ordre de Blacas, deux anneaux d'or placés à chaque extrémité de la chaîne, viennent s'attacher sous le marbre, à la main des deux amants, comme pour les unir à jamais".
La chaîne porteuse de la comète qui traverse encore de nos jours le ciel de Moustiers (Photo internet)
Source : D'après une chronique de Louis-François de Villeneuve-Bargemon écrite en 1824 et reprise par Jacques Lecugy dans le numéro 33 de la revue Verdons - décembre 2010.
Zézette, une cagole de l'Estaque, qui n'a que des cacarinettes dans la tête, passe le plus clair de son temps à se radasser la mounine au soleil ou à frotter avec les càcous du quartier. Ce soir-là, revenant du baletti ou elle avait passé la soirée avec Dédou, son béguin, elle rentre chez elle avec un petit creux qui lui agace l'estomac. Sans doute que la soirée passée avec son frotadou lui a ouvert l'appétit, et ce n'est certainement pas le petit chichi qu'il lui a offert, qui a réussi à rassasier la poufiasse. Alors, à peine entrée dans sa cuisine, elle se dirige vers le réfrigérateur et se jette sur la poignée comme un gobi sur l'hameçon. Là, elle se prend l'estoumagade de sa vie. Elle s'écrie : - Putain la cagade ! Y reste pas un rataillon, il est vide ce counas ! En effet, le frigo est vide, aussi vide qu'une coquille de moule qui a croisé une favouille. Pas la moindre miette de tambouille. Toute estransinée par ce putain de sort qui vient, comme un boucan, de s'abattre sur elle, Zézette résignée se dit : - Tè vé, ce soir pour la gamelle, c'est macari, on va manger à dache. C'est alors qu'une idée vient germer dans son teston. - Et si j'allais voir Fanny ! Se dit-elle. En la broumégeant un peu je pourrais sans doute lui resquiller un fond de daube. Fanny c'est sa voisine. Une pitchounette brave et travailleuse qui n'a pas peur de se lever le maffre tous les jours pour remplir son cabas. Aussi chez elle, il y a toujours un tian qui mijote avec une soupe au pistou ou quelques artichauts à la barigoule. Zézette lui rend visite. - Bonsoir ma belle, coumé sian ! Dis-moi, comme je suis un peu à la dèche en ce moment, tu pourrais pas me dépanner d'un péton de nourriture ? Brave comme tu es, je suis sûre que tu vas pas me laisser dans la mouscaille ! En effet, Fanny est une brave petite toujours prête à rendre service. Mais si elle est brave la Fanny elle est aussi un peu rascous et surtout elle aime pas qu'on vienne lui esquicher les agassins quand elle est en train de se taper une grosse bugade. Ça c'est le genre de chose qui aurait plutôt tendance à lui donner les brègues. Alors elle regarde Zézette la mangiapan et lui lance : - Oh collègue ! Tu crois pas que tu pousses le bouchon un peu loin ? Moi !, tous les jours je me lève un tafanàri comaco pour me nourrir ! Et toi pendant ce temps là, qu'est-ce que tu fais de tes journées ? - Moi ! ? lui répond la cagole... J'aime bien aller m'allonger au soleil ! Ça me donne de belles couleurs et ça m'évite de mettre du trompe couillon. - Ah ! Tu aimes bien faire la dame et te radasser la pachole au soleil, et bien maintenant tu peux te chasper. Non mais ! ? Qu'es'aco ? C'est pas la peine d'essayer de me roustir parce que c'est pas chez moi que tu auras quelque chose à rousiguer, alors tu me pompes pas l'air, tu t'esbignes et tu vas te faire une soupe de fèves.
Texte de Richard Caldi
Source : Trouvé sur le site de l'écomusée de la Vallée du Gapeau que je vous recommande de visiter
Trahis par l'envol effrayé de quelques pigeons, d'innombrables colombiers (de coulon, nom ancien du pigeon) se révèlent soudain au regard du voyageur. A celui qui daigne s'en approcher, ces citadelles narrent une époque où leurs hôtes volatiles participaient au quotidien de la communauté rurale. Moyens de communication formidables quand le téléphone n'existait pas, lorsque la poste allait un train de sénateur, messagers d'espoir en temps de guerre, les ramiers sont depuis la plus haute Antiquité, pourvoyeurs de chair délicate. Synonyme de fertilité, leurs fiente ou colombine, amendera les terres jusqu'à l'avènement de l'engrais chimique. Rien d'étonnant alors, si d'un bout à l'autre de la Provence, on trouve des pigeonniers.
Pigeonnier à l'entrée de Lourmarin 84 - (Photo internet)
Ils sont tous différents car chacun les édifie selon ses moyens. Ceux dits "à pied" sont l'apanage des grands domaines et ils accueillent des milliers de volatiles du bas jusqu'en haut de la bâtisse. Ceux-là sont assujettis à des taxes jusqu'à la Révolution, dont seuls les seigneurs peuvent s'acquitter. Ici et là s'érigent des structures plus modestes, sur solives ou à cheval, dispensées de toute autorisation de construire. Ceux-là n'hébergent des pigeons que dans la partie supérieure de l'édifice : le rez-de-chaussée sert de remise ou de poulailler, et l'étage supérieur, de réserve pour le récoltes. Somptueusement coiffés d'un clocheton polychrome ou encastrés dans la falaise tels les singuliers pigeonniers rupestres de Quinson (04), de Lauris (84) et des Baux (13), moulins à vent ou tours de guet moyenâgeuses détournées, ils ont en commun le souci de leurs hôtes. Larges lucarnes aménagées dans le toit pour faciliter le ventilation, grilles d'envol plein sud, à l'abri du mistral et de dimensions réduites, histoire de barrer l'accès aux buses et aux faucons.
Pigeonnier à Tavernes 83 - (Photo internet)
Pigeonnier à Lanson de Provence 13 - (Photo internet)
Généralement, une randière, mosaïque de carreaux vernissés vert olive, mordorés, rouges et bruns, ceint le pigeonnier ou du moins les ouvertures, empêchant l'ascension des rats, belettes et fouines. Sur la hauteur du bâtiment, courent des larmiers, souvent en tuiles, parfois en pierre ou en lauze. Disposées en génoise, voire en une ou plusieurs rangées successives, ces cordelières, outre qu'elles coupent la monotonie verticale de la façade par leurs courbes et surplombs, renforcent la solidité de l'édifice et servent de promenoirs au pigeons. Le pigeonnier conjugue ornements et accessoires et présente une typologie différente selon les régions. Aux abords du delta du Rhône, l'architecture flirte avec les chaudes tonalités de la pierre blanche, exempte de carreaux vernissés, percée d'ouvertures en pyramide. Près d'Aix-en-Provence comme sur les premières terres brûlées de Haute-Provence, la préférence est donnés aux colombarii cylindriques, inspirés de l'Antiquité.
Les bories de Gordes appelées les trois soldats, dont deux pigeonniers (Photos internet)
Tous valent le détour comme ces pigeonniers-bories de Gordes, surmontés de quilles en pierre (symboles phalliques de fertilité) au nombre de trois dont deux pigeonniers, ou bien celui construit au XVIème siècle dans l'ombre du château de Lourmarin, naguère riche de trois mille boulins.
Le colombier de Brue-Auriac (photo internet)
A Brue-Auriac (83), le plus grand colombier de France du XVIIIème siècle est l'un des plus étonnants. Il est répertorié comme étant un des plus beaux pigeonniers de Provence et d'Europe : 22,50 m de haut et 12,43 m de diamètre. Il pouvait contenir plus de 1500 pigeons. Sa toiture est soutenue et décorée de pilastres. Le pigeonnier a été construit aux environs de 1750 par Georges Roux de Corse, armateur Marseillais qui élevait des pigeons voyageurs. Il est bâti sur un plan circulaire, de manière à pouvoir installer une échelle tournante permettant d'accéder individuellement à chacun des nids appelés "boulins" : un arbre vertical élevé au centre de la tour soutenait une échelle verticale ou inclinée se déplaçant à une faible distance de la paroi.
Pigeonnier à Limans 04 - (Photo internet)
A ces construction circulaires, d'autres préféreront la tour carrée, plus facile à bâtir : lucarnes au niveau de la toiture en cascade ou "pied-de-mulet", bandeau aux rives des murs pour protéger des vents dominants, grilles d'envol flanquant la façade principale en Camargue ou dans les Alpilles, pierre de taille sur encorbellements, à l'instar du pigeonnier de Limans, dans la pays de Forcalquier (04).
Si ces pigeonniers sont volontairement isolés, d'autres s'adossent carrément aux bâtiments d'exploitation. Ainsi au château de Calissanne, entre La Fare-les-Oliviers et Saint-Chamas, un colombier néogothique du XIXème siècle aux allures fantasmagoriques trône dans l'angle d'un bâtiment, véritable rotule dans la liaison des volumes. Cent mètres en contrebas, un pigeonnier sur toit embrasse la campagne alentour. Le prieuré de Saint-Roch, à Tarascon, abrite, lui, une belle construction en pierre coiffée d'une dôme et d'un escalier de même facture.
Chapelle-colombier de Sainte Madeleine à Mirabeau 84 - (Photo internet)
Près de Pertuis, la chapelle-colombier de Mirabeau, du haut de son roc, domine la Durance depuis le XIIIème siècle ; construction de style roman, avec façade et clocher dotés de pierres en relief en guise de plage d'envol. Combien de colombiers singuliers se voient ainsi en terre provençale ? Plusieurs milliers... Laissez traîner le regard du côté des propriétés agricoles, en plaine ou à flanc de coteau, vous en découvrirez de nouveaux, spectaculaires dans l'équilibre des volumes. Ces sentinelles du patrimoine offrent à chacun de survoler l'histoire rurale, de rappeler qu'ici en Provence, la liberté architecturale fut acquise aux roturiers bien avant la Révolution. En espérant que ces petits bâtis trop souvent voués à la ruine mais classés à l'inventaire des Monuments historiques cependant, demeureront encore longtemps des bastions du paysage méridional.
Source : D'après un article paru sur Pays de Provence - n°34 mars-avril 2003
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Je mets le lien d'un article paru le 21 janvier 2013 et qui avait pour titre : Les pigeonniers de Haute-Provence.
Pigeonnier à Châteaufort Alpes-de-Haute-Provence (Photo Wikipédia) Pigeonnier en Provence (Carte postale) Pigeonnier à Limans (Alpes-de-Haute-Provence (Photo Wikipédia) Autant de provinces, autant de coutumes différentes à l'égard du droit au pigeonnier. En Haute-provence, sous l'Ancien Régime, les pigeonniers étaient exclus des privilèges seigneuriaux.
Un couple nu se délasse dans un baquet rempli d'eau ; des femmes et des hommes dans le plus simple appareil se pressent devant un buffet, goûtant des mets savoureux... Le Moyen-Age, moins prude qu'on veut bien le dire, nous a légué nombre d'enluminures, gravures et autres miniatures de ce genre. Leurs décors sont les étuves, ces établissements de bains publics où chacun s'il en a les moyens, vient s'adonner aux plaisirs autorisés et même recommandés de la toilette. Mais certaines de ces œuvres montrent un élément quelque peu inattendu : un lit, dont le dais, relevé, laisse entrevoir un couple se livrant à d'autres agréments que ceux des ablutions. Implantées dans les villes à partir du XIIème siècle les étuves publiques répondent aux besoins d'une population en augmentation permanente. Mais dès le siècle suivant, elles acquièrent une réputation sulfureuse. Et, bien que la débauche y soit interdite, elles s'affirment comme l'un des principaux lieux de prostitution. Les premières étuves sont mixtes et ouvertes à tous. De plus, les clients peuvent se baigner en chemise ou dévêtus, car au Moyen-Age, la nudité n'est pas considérée comme sale.
Et quand les étuves sont près de chez eux, les gens qui ont peu de moyens s'y rendent parfois sans vêtements, de peur de se les faire voler ! Mais dans ces étuves, on y boit et on y mange épicé, on festoie. Et évidemment, cela engendre des envies ! Sans oublier la présence des "frotteuses" (terme apparu vers 1350), ces servantes qui lavent le corps des clients avec des parfums, et dont certaines deviennent des filles de joie. De ce fait, les maisons de bain ont des chambres à l'étage et on y trouve des lits. C'est seulement à partir du XVème siècle que des villes imposent une séparation hommes-femmes ou distinguent les étuves "honestes" des prostibulaires (terme relatif à la prostitution et à l'adultère). Mais, dans les cités médiévales en plein essor, selon faisait déjà longtemps que le prostitution débordait l'intimité des étuves. Toute bonne ville a ses filles, comme Avignon par exemple. Filles et fillettes joyeuses, folles de leur corps et autres belles dames cherchent le client dans les tavernes, les moulins, les fossés, aux abords des ponts, des églises ou des lieux de pèlerinage et jusque dans les cimetières, espaces non clos à l'époque et où se tiennent foires et marchés. Il s'agit souvent d'étrangères qui s'exilent pour préserver leur réputation. Certaines se déplacent en charrettes ambulantes, pour éviter de tomber sous la coupe des municipalités. Un proxénète peut aussi mener trois ou quatre filles de ville en ville. Qui sont leurs clients ?
Explication du terme proxénète : terme du XVIème siècle, emprunté par l'intermédiaire du latin proxeneta, du grec proxenêtês "celui qui s'entremet pour un marché, courtier. Mais encore personne qui tire des revenus de la prostitution d'autrui. On dit aussi souteneur et dans le langage populaire maquereau ou maquerelle.
Source : Dictionnaire de l'Académie française
"Tout proche est le terme de ton chemin, et le joyeux bordel aussi, qu'on repère aux odeurs qu'il exhale, entre donc et salue de ma part les maquerelles et les putains, toutes vont t'accueillir au sein de leurs caresses."
Source : Le Parnomita, Hermaphroditus, XIVème siècle
Suite du texte : Qui sont leurs clients ? Des mauvais garçons, des artisans, des paysans, des soldats, des étudiants, des bourgeois et même des curés ! Au XVème siècle, une fille vaut le prix d'un œuf ! Difficile pour le très pieux saint Louis (Louis IX) d'accepter que la débauche se banalise dans son royaume. Le péché de luxure est le plus combattu par l'Eglise. Le roi promulgue dès 1254 une ordonnance visant à expulser les prostituées des villes de France. Un arrêt cependant bien difficile à faire respecter, d'où la relative tolérance du souverain qui deux ans plus tard, réduit le périmètre d'exclusion aux beaux quartiers et aux lieux saints. Il s'est rendu à l'évidence, sous l'influence de l'Eglise dont les positions sur la fornication ont évolué. Ces pratiques coupables sont donc tolérées, voire organisées, les lieux de résidence et horaires de "travail" réglementés. Avec une différence notable entre le nord et le sud du royaume. Au nord, la prostitution est cantonnée dans certains quartiers au noms fleuris tels : rues de la Fesse à Douai, rue Trace-putain et Tire-boudin à Paris. Rejetée en périphérie, elle gagne aussi les faubourgs ou les bords de fleuves, d'où le mot bordeau. A Besançon, les fillettes racolent sur les rives du Doubs avant de ramener le client au bordel pour la passe. En revanche, dans le sud du royaume, ce ne sont pas des rues mais de véritables établissements qui sont consacrés à la prostitution. Celle-ci est davantage contrôlée et les bordels publics qui apparaissent au XVème siècle ont pignon sur rue. Château-Gaillard à Tarascon, Bon-Hôtel à Aix (en Provence).
Souvent situées au cœur des villes, ces maisons attirent une clientèle populaire, surtout des célibataires. Concurrencés par les tavernes, les bordels privés, dont les étuves et la prostitution de rue, ces établissements publics sont administrés par les pouvoirs urbains qui en tirent profit. Les municipalités font office de proxénètes. Le tenancier du bordel peut être une ancienne prostituée ou bien encore un sergent ! Ainsi, à Perpignan, une ordonnance consulaire de 1330 incite les filles à demeurer dans un lieu-dit surveillé par le "père des orphelins" qui est lieutenant de police. Quant aux ecclésiastiques, ils sont aussi très impliqués car l'Eglise est propriétaire de nombreux immeubles qu'elle loue. A Avignon, dès 1337, le maréchal du pape surveille les prostituées et touche chaque semaine deux sous par courtisane. Les tenanciers de bordels sont d'ailleurs souvent nommées "abbés" ou "abbesse" et certains établissements comme celui de Toulouse "abbaye". Ces "maisons communes" sont conçues comme des garants de l'ordre social et moral, il s'agit de satisfaire les ardeurs masculines et de protéger les honnêtes femmes. Le bordel public est créé par les autorités urbaines dans le but de canaliser la sexualité hors mariage en un lieu clos.
Les prostituées sont des pécheresses, mais elles peuvent être sauvées car elles ont le droit d'aller à l'église et même d'être enterrées dans le cimetière, si elles se sont confessées avant de mourir et rien ne leur interdit par ailleurs d'assister aux fêtes publiques. Dès la fin du XVème siècle, toutefois, la peur de la maladie et de la mort entraîne un changement des mentalités qui frappe les prostituées. La syphilis fait des ravages au sein d'une population déjà éprouvée par les épidémies de peste et par les guerres. Les filles joyeuses font place aux garces, putains et femmes impudiques. La prostituée devient l'enrôleuse macabre, porteuse de tous les vices. Jugés dangereux par les autorités, bordels et étuves ferment dès 1550, et l'ordonnance de 1560 promulguée l'année suivante, met fin à l'existence officielle de la prostitution. Dans les faits, elle continue en toute illégalité à essaimer dans les tavernes, rues et maisons. Les châtiments publics infligés aux femmes de mauvaise vie deviennent alors un moyen de pression morale pour satisfaire le puritanisme associé à la Réforme et à la Contre-Réforme (XVIème siècle).
Le pont d'Avignon
Avignon, nouvelle Babylone ?
Selon un adage du Moyen-Age, on ne peut traverser le pont d'Avignon, sans rencontrer deux moines, deux ânes et deux putains. Au XIVème siècle, l'image sulfureuse de la ville s'explique par l'explosion de la population urbaine liée à l'installation du pape en 1309 (voir mon article sur les papes en Avignon paru le 20 mars 2022). Avec l'arrivée de la cour pontificale, des cardinaux, des princes étrangers, des marchands, l'ambiance est particulièrement survoltée. Au milieu du siècle, la prostitution avignonnaise a son quartier principal : le Bourg Neuf dans les environs du couvent des franciscains. Il est traversé par la Bonne-Rue, où l'on trouve les "bonnes maisons". Pour autant, la prostitution s'intègre dans le tissu social et les bordels sont aussi dispersés dans la ville (près des Carmes, de l'archevêché...) qui compte à cette époque, une dizaine d'étuves. Les filles racolent également dans les cimetières paroissiaux. Dans le cimetière Saint Pierre, il se commet des adultères même la nuit. Sur la plainte du chapitre de saint-Pierre, le pape Innocent VI ordonne sa clôture en 1359. Quant au cimetière du Pont-Frac, au vu des désordres, l'évêque d'Avignon y fonde une chapelle en 1347. Un moyen d'inciter aux bonnes mœurs.
Source : Hors-série Sciences et Avenir : Vivre en ville au Moyen-Age - Les nouvelles découvertes - paru en octobre/novembre 2016. D'après l'article "Les filles joyeuses des bains publics" de Laureen Bouyssou.
Les Saints de glace sont issus d’une vieille croyance populaire datant du Moyen-Age. Ils sont fêtés chaque année les 11, 12 et 13 mai. Les régions les plus septentrionales, notamment l'Alsace, où les gelées sont généralement plus tardives ont ajouté également les 19, 20 et 25 mai. Les agriculteurs des régions du Nord de la Méditerranée imploraient jadis Saint Mamert, Saint Pancrace et Saint Servais de protéger les plantations de la baisse des températures et du gel qui survenaient habituellement à cette époque. Il pouvait en effet arriver que les récoltes subissent un gel destructeur, survenant de manière plus ou moins brutale, dans les zones montagneuses jusqu’à la fin mai. Au-delà de cette période, à partir du 26 mai, on considère généralement que les jardiniers peuvent commencer à semer et planter sans craindre un coup de froid qui sera fatal. De là découle toute une série de proverbes et de dictons régionaux tels que "Saints Pancrace, Servais et Boniface apportent souvent la glace", "Quand il pleut à la Saint Servais, pour le blé, signe mauvais", "Quand la Saint Urbain est passée, le vigneron est rassuré" mais encore "Saint Servais, Saint Pancrace et Saint Mamert font à trois un petit hiver".
Qu'en est-il de la légende ? Elle prend sa source au début du deuxième millénaire alors que la "vague de froid printanier" apparaissait réellement au cours du mois de mai dans certaines régions du monde. Les populations du Nord de la Méditerranée avaient observé une chute des températures nocturnes et des matinales une fois tous les deux ans à cette époque. Les astrophysiciens expliquent l’origine de cette croyance par le fait que vers mi-mars l’orbite de la Terre traverse une zone de l’espace chargée de poussières qui sont constituées de résidus de planètes qui représente un obstacle aux rayons du soleil. Les effets du soleil sur la Terre seraient alors diminués, ce qui conduirait à une baisse significative des températures. De nos jours, il semblerait que celle-ci ait été avancée d’au moins un mois, plutôt dans le courant du mois de mars. Il n’est pourtant pas impossible qu’une vague de froid se produise au mois de mai. En effet, des courants froids venus des hautes latitudes envahissent parfois la France. Ils engendrent une baisse marquée des températures. Sous un ciel dégagé et sans vent, des gelées tardives peuvent alors se développer. La légende des Saints de Glace a donc bien un fond de vérité, même si les observations basées sur les dernières années tendent à montrer que le mois de mai s’avère être de moins en moins une période à risque pour les plantations.
Le poids public a été construit dans quasiment chaque ville et village de France. Son histoire est liée à un impôt de notre pays : l'octroi. Il consistait à taxer divers produits qui entraient dans les bourgs ou les agglomérations, en fonction de leurs poids. Il fallait donc peser, vin, bière, charbon, chaux, bestiaux de boucherie, poissons, minerais, huile, bois... A cet effet, durant le XIXème siècle, chaque municipalité fait bâtir à l'entrée de sa commune un petit édifice de plan carré ou hexagonal, en général en pierre de taille. Ce poids public, appelé aussi dans le jargon populaire, pont à bascule, dispose devant lui d'une plateforme de pesage. Ce tablier en fer accueille tous les véhicules à peser : charrettes, et plus tard, camions, voitures, wagonnets... Dessous, dans une fosse, un système complexe de leviers permet de perser le chargement. Le poids est directement affiché sur un cadran à l'intérieur de la construction. C'est un officier assermenté, le peseur, qui s'occupe de l'opération et délivre des bons de pesage. Il fait passer le véhicule en charge puis à vide, la différence donnant la quantité de marchandise livrée... Avec la suppression de l'octroi en 1943, les poids publics perdront petit à petit de leur importance. Ils seront cependant encore largement utilisés, en libre-service, par de nombreux corps de métiers : les vignerons pour peser leurs vendanges, les bûcherons, leurs stères de bois, les maçons, leur sable, etc... D'autres ponts à bascule seront même construits près des marchés ou des champs de foire pour estimer les animaux vendus, les cargaisons de fruits et de légumes... Toutes ces installations typiques deviendront obsolètes avec l'augmentation du tonnage transporté par les camions et l'installation de nouveaux engins de pesage dans les entreprises.
Source : Le petit bâti - Sud de la France - Hubert Delobette.
Les deux photos représentent le poids public à Aups dans le Haut-Var
A Trans-en-Provence, il y avait deux ponts à bascule : l'un à la coopérative vinicole et l'autre derrière l'église. Ils n'existent plus ni l'un ni l'autre. Je me souviens de celui qui était derrière l'église puisque je n'habite pas loin de l'endroit où il se trouvait. Lorsque celui-là a été démoli, je n'ai pas pris de photo. Il faut dire qu'à l'époque je ne faisait pas encore de blog et je ne pensais pas qu'un jour j'aurai pu vous montrer la bascule.
Je copie ici le commentaire de Giselle, une de mes lectrices qui nous dit : "Dernier vestige aussi devant notre coopérative vinicole, bientôt transformée en appartements... et le poids public a certainement déjà dû d'ailleurs disparaître... On est parfois tellement habitué à voir les choses qu'on ne les voit plus en fait... et on cherche en vain à retrouver ces "souvenirs", leur emplacement exact, etc... Merci Nadine pour ce billet fort intéressant.
Je copie également le commentaire d'Anne-Marie, qui nous parle de l'octroi de Draguignan : "Je me souviens à Draguignan, de celui qui se trouvait à l'emplacement de l'actuel Office du Tourisme, exactement la même construction que celle des photos de l'article. Il n'était plus en service depuis longtemps dans les années 60 mais je me rappelle que pour emprunter ce trottoir (pour aller retrouver notre bande de copains à La Civette qui était notre QG et y faire chauffer le juke-box), nous devions marcher sur les planches de la bascule.
J'ai vu sur des photos anciennes de Draguignan qu'il y en avait également un autre au carrefour de l'avenue du 4 Septembre qui marquait à l'époque le début de l'avenue que nous appelions la route de Lorgues, et que tous les dracénois véritables appellent toujours ainsi. Il a dû être démoli très tôt car même dans les années 50, je ne l'ai pas connu. En revanche je ne me souviens pas de celui qu'évoque Giselle, je n'allais pas beaucoup dans le quartier de la coopérative, si tant est qu'elle parle de celle de Draguignan. Edifice qui va bientôt disparaître et que je regretterai moi aussi. Merci Nadine de raviver des souvenirs d'enfance qui nous sont chers".
Une carte postale qui représente le Champs de Mars à Draguignan avec l'octroi à gauche. Ci-dessous, une autre carte du même endroit. Vous verrez que tout a bien changé de nos jours. Et une dernière qu'Anne-Marie vient de me transmettre qui montre l'octroi qui se trouvait tout en bas des allées d'Azémar, face à la route de Lorgues.
Source pour cette photo :
Livre "Mémoire en images" Draguignan - Charles Clairici et Louise Armero.