La création du département du Var
Le 7 septembre 1789, l'abbé Sieyès (Emmanuel-Joseph Sieyès est né le 3 mai 1748 à Fréjus) monte à la tribune de l'assemblée constituante à Paris et annonce : "Citoyens, une grande réforme est en train de se préparer pour la France : nous allons créer des départements." Une grande réforme en effet car l'administration de la France allait être complétement bouleversée".
Une première carte des départements est réalisée par une commission présidée par un certain Thouret. Elle se présente sous forme de 81 carrés qui quadrillent la France. Plus tard, lors de la séance suivante de l'assemblée constituante, certaines personnes font remarquer que ces carrés ne correspondent pas à la réalité géographique du pays. Une nouvelle carte est donc redessinée. Le nouveau résultat est présenté le 22 décembre 1790. Cette fois-ci, on arrive à un total de 83 départements dont les limites seront définies par les décrets du 15 janvier puis du 16 février 1790. Les noms de ces départements sont donnés en fonction de la géographie. C'est ainsi par exemple que le département du Var prend le nom du fleuve qui le limite à l'est. Le département des Alpes-Maritimes ne sera créé qu'en 1793 après la conquête du comté de Nice par l'armée révolutionnaire française en incluant Monaco et San Remo. La numérotation des départements sera alphabétique. C'est ainsi que le Var portera le numéro 78. Quant aux Alpes-Maritimes, rajoutées par la suite, elles porteront le numéro 85. En fait, c'est en 1815 que les départements seront reclassés et porteront les numéros qu'ils ont aujourd'hui. Il faut également penser à fixer les préfectures de ces départements. Pour le Var, on désigne Toulon et Nice pour les Alpes-Maritimes. Puis, le Var est divisé en neuf districts : Toulon, Grasse, Hyères, Draguignan, Brignoles, Saint-Maximin, Fréjus, Saint-Paul-de-Vence et enfin Barjols. Les Alpes-Maritimes comprendront trois districts : Nice, Menton (y compris Monaco) et Puget-Théniers. Toulon devient donc capitale varoise et en 1793, les royalistes toulonnais se soulèvent contre la Révolution. Ils demandent à la flotte anglaise de les aider. Ce sera le siège de Toulon. Le 1er octobre 1793, le baron toulonnais Imbert proclame roi de France, l'enfant de Louis XVI détenu à la prison du Temple à Paris. Un jeune capitaine nommé Napoléon Bonaparte arrivera à bout du siège de Toulon en 1793. Le répression sera terrible. Il y aura huit cents fusillés sur le Champ de Mars. Puis le 24 décembre 1793, la Convention nationale prend un décret : certaines communes vont être débaptisées et porteront un autre nom. C'est ainsi que Toulon s'appelera désormais : Port-la-Montagne : "Le nom infâme de Toulon est supprimé. La ville est déchue de son rang de chef-lieu". Grimaud deviendra Athènople, Saint-Raphaël sera Barraston (de Barras qui sera l'un des cinq directeurs du Directoire), Sainte-Maxime sera Cassius, Entrecasteaux deviendra Entre-Montagnes, Saint-Tropez sera Héraclée, Saint-Maximin sera Marathon, Châteaudouble, Montdouble, Saint-Julien (le Montagnier) sera Mont-Rocher, Saint-Martin (de Pallières) deviendra Roc-Tarpéien, La Roquebrussanne, Roquelibre, et Sanary (sur-Mer) deviendra Sanary-Beau-Port.
La ville de Toulon n'étant plus chef-lieu, c'est la ville de Grasse qui le deviendra car cette commune est connue pour avoir bien accueilli la Révolution. Grasse est instituée préfecture jusqu'en 1793 et le restera jusqu'en 1795. Mais la cité étant trop excentrée par rapport au reste du département, Grasse sera remplacée par Brignoles. Au moment de la constitution des départements, selon le mathématicien et homme politique Nicolas de Condorcet, il avait été établi que : "dans chaque département, tous les citoyens pourraient faire un aller-retour à cheval de chez eux au chef-lieu en l'espace d'une journée." Brignoles se trouvait aussi au centre du département et avait elle aussi bien servi la Révolution. En effet, on avait vu l'avocat brignolais Joseph Magnan se joindre à l'émeute des paysans et des tanneurs les 26 et 27 mars 1789. Mais Brignoles ne restera pas préfecture longtemps.
A Draguignan, deux députés, Honoré Muraire et Maximin Isnard, revendiquent ce titre pour leur ville. Ils sont très actifs au plan national. Le premier, Dracénois de naissance, maire de Draguignan depuis l'âge de 35 ans a fait voter deux lois importantes : l'autorisation de mariage sans le consentement des parents et l'autorisation de divorce. Le second, Maximin Isnard est natif de Grasse et il est proche de Bonaparte. C'est ainsi que tous les deux arrivent à élever leur ville au rang de préfecture. Brignoles laisse la place à Draguignan qui restera préfecture jusqu'en 1974. Puis ce sera Toulon qui occupera cette place, Draguignan devenant sous-préfecture et l'étant encore de nos jours. Toulon, Grasse, Brignoles et Draguignan, le Var aura eu quatre préfectures différentes en quatre ans. Les Alpes-Maritimes, elles, cesseront l'exister à la fin du Premier Empire, étant réintégrées au Royaume de Piémoint-Sardaigne. Elles seront rétablies en 1860, lors du second rattachement de Nice à la France, récupérant alors une partie du département du Var, dont la ville de Grasse.
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Le nombre de départements aujourd'hui
Le nombre de départements a évolué au cours de l'Histoire. Il y en avait 81 lors du projet de 1789, il passera à 83 au moment de leur création en 1790. Il atteignit ensuite le nombre de 130 en 1810 à la suite des annexions territoriales de l'Empire en Allemagne, dans les Pays-Bas, en Italie, en Espagne. En 1815, il retomba à 86 après la chute de l'empire. En 1860, le rattachement de Nice et de la Savoie le refait passer à 89 avec la création des Alpes-Maritimes, de la Savoie et la Haute-Savoie. Après la guerre de 1870 et la perte de l'Alsace et de la Lorraine, le nombre retombe à 86. Il repassera à 89 au retour de ces deux régions après la Première Guerre mondiale. Aux départements de métropole s'ajoutèrent les départements algériens : trois en 1848, quatre en 1902, cinq en 1955, 15 en 1959. La réorganisation de la région parisienne en 1968 augmenta de sept le nombre de départements et la scission en deux de la Corse, en 1976, d'un supplémentaire. En comptant l'outre-mer, le total des départements français est désormais de 101.
Source : D'après un article paru dans le supplément de Var-matin du 20 novembre 2021 - Auteur : André Peyregne
Les départements français aujourd'hui