Les rites de la mort en Provence
La mort a ses coutumes dont certaines sont encore pratiquées de nos jours. Dès que le dernier soupir emportait l'âme d'un agonisant, on arrêtait le travail (les tâches indispensables comme les soins à donner au bétail étaient prises en charge par des voisins), puis on fermait les fenêtres, on voilait les miroirs avec des nappes blanches, on éteignait le feu dans la pièce et on arrêtait les pendules. Puis le mort était vêtu de ses plus beaux habits, souvent le costume de son mariage qu'il n'avait remis qu'à l'occasion de baptêmes. Puis, on allumait un cierge à son chevet.
Les proches et les voisins s'occupaient des démarches et faisaient savoir le décès dans le village prévenant le curé pour sonner le glas et déclaraient le décès à la mairie. Un membre de la famille s'installait dans la chambre et recevait tous ceux du village qui venaient rendre visite et présenter leurs condoléances ; en entrant, ils signaient le mort avec le brin d'olivier ou de laurier plongé dans un verre d'eau bénite.
La veillée funèbre groupait parents, voisins, on buvait du café et on discutait pour se tenir éveillé. Il arrivait que la conversation tourne vers des sujets tout à fait étrangers à l'évènement ou au passé de celui qui n'était plus et quelquefois on racontait des épisodes drôles.
Le fourgon funèbre était tout drapé de noir bordé de galons et de pompons argentés ; tiré par un cheval il nous amenait doucement à l'église où pénétraient seulement les femmes, les hommes restant à l'extérieur ou au café le plus proche. Après la cérémonie, on reprenait le cortège et en suivant le mort jusqu'à sa dernière demeure, tout comme aujourd'hui, beaucoup d'hommes bavardaient, les femmes, elles, ressentaient plus profondément la tristesse de cet accompagnement et elles étaient souvent plus silencieuses. De retour à la maison, toute la famille et ceux qui s'étaient déplacés de loin se retrouvaient autour de la table où le repas était animé en évoquant les moments heureux ou gais de la vie du disparu, parfois on riait. On se quittait en se promettant de se voir plus souvent tout en sachant bien qui c'était les décès qui, le plus souvent, réunissaient la famille. De nos jours, on ne veille plus les morts, on ne voile plus les miroirs. Dans les villages pauvres, le cercueil était chargé sur un char à banc et quelquefois même, porté à bras. Après la mort la désinfection était sommaire. L'eau de Javel n'était pas connue au début du siècle ; on laissait le linge étalé sur l'herbe la nuit et le "serein" le blanchissait. Quand on avait perdu un être cher d'une maladie contagieuse, le linge qui avait servi était enterré dans un trou creusé profond où il restait trois jours, après lesquels on estimait que les microbes étaient détruits. Suite à ce séjour en terre, on le lessivait plusieurs fois, mais comme on gardait certains vêtements et les chaussures, la contagion courait et des familles entières étaient emportées par la tuberculose !
Source : Les Maures, terre de Provence - Georgette Brun-Boglio - Editions Les Presses du Midi.
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Si vous désirez lire ou relire un article paru le 4 mars 2018 : "Les âges de la vie", je mets le lien afin que vous puissiez y aller :
De nombreuses coutumes marquent les différentes étapes de la vie, le premier et le dernier jour. Vivaces à l'époque qui nous concerne, certaines perdurent jusqu'à nos jours. A la naissance, la mère était assistée par une femme expérimentée du voisinage "la buono fremo" (la bonne femme) et la superstition voulait que le nouveau né ne sorte pas avant le baptême qui devait avoir lieu dans les trois jours suivant la naissance.
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