La légende des pénitents des Mées
Sur la commune des Mées dans les Alpes de Haute-Provence se trouve une formation géologique très particulière, nommée les Pénitents. C'est d'ailleurs ce qui fait sa notoriété. Ce nom provient de la forme d'une masse rocheuse très découpée, à côté du village, qui évoque un groupe de moines coiffés de capuches pointues. Celle-ci est le résultat de l'érosion sur le substrat rocheux, qui possède des irrégularités de cohésion, et conduit donc à des zones proéminentes et à d'autres sur-creusées. Ce substrat est appelé la "formation de Valensole", conglomérat formé par une accumulation de débris sub-alpins au cours de la fin du Miocène et du Pliocène, épais de plusieurs centaines de mètres. Bien que la façade des Pénitents évoque des formes rocheuses plus ou moins coniques, il s'agit d'un ensemble de crêtes et de minuscules canyons, s'interrompant simultanément sur un plan vertical. Cette formation s'étire sur environ un kilomètre, et la falaise la plus haute atteint 114 mètres. On les appelle les "Pénitents des Mées" en raison de leur silhouette (lire la légende ci-dessous). Un seul sentier permet de traverser cette barre rocheuse. Il rejoint le sentier des crêtes qui part du village et longe par le haut cet ensemble. Les autres canyons sont d'accès difficile et très dangereux à cause des chutes de pierres fréquentes. La pratique de l'escalade n'y est pas possible, la roche n'ayant pas la cohésion appropriée. On trouve, dans cette masse rocheuse sculptée deux grottes d'accès facile. Ce sont : la Grotte des Loups et la Grotte du Magicien, ainsi qu'une cavité à l'accès extrêmement difficile, dans laquelle se trouvent deux poutres entrecroisées appelée "La Croix", dont l'âge et l'origine sont inconnus. En outre, il a été observé dans ce labyrinthe rocheux des marques d'installations anciennes dans un endroit stratégique (entailles dans la roche pour installer des poutres), mais ces vestiges ne sont pas datables. Au XVIIIe siècle, une galerie de 200 m a été creusée au travers de la barre rocheuse afin de s'affranchir des eaux de pluie qui dévastaient le village lors des orages.
Source : D'après Wikipédia, l'encyclopédie libre.
"Cela se passait au temps où les Sarrasins avaient envahi la région provençale. Ils s'étaient installés dans les collines à Peirempi entre Buech et Jabron et faisaient régner la terreur dans les villages environnants. Quelques seigneurs du voisinage dont Bevons de Noyer et Rimbaud des Mées décidèrent d'attaquer le camp des Sarrasins. Ce qui fut fait par une nuit sans lune. La surprise et la détermination des seigneurs eurent raison des envahisseurs après une lutte courte mais très intense. Au matin, après avoir nettoyé la place, et chassé ou bien passé au fil de l'épée leurs ennemis, ils entrèrent dans le château. Quel ne fut pas leur étonnement lorsqu'ils trouvèrent dans une grande chambre, sept belles mauresques terrorisées, qui demandaient grâce... Il n'était point question de les tuer, les chevaliers ne tuent pas les dames. Ils se consultèrent et il fut décidé que ce serait Rimbaud des Mées qui se chargerait de les expédier par radeau sur la Durance jusqu'au pays d'Arles où là-bas les autorités décideraient de leur sort en temps et heure. Rimbaud avec ses gens et ses sept captives prirent donc le chemin des Mées. Cependant durant le périple, le sang bouillant et exalté du beau et fringant guerrier aviva en lui des sentiments bien humains. Les grands yeux noirs et tristes des belles mauresques firent le reste. Il prit prétexte que la Durance était un peu grosse et qu'il était dangereux de s'embarquer pour retarder le départ de quelques jours et il enferma les prisonnières dans sa vaste demeure entre Dabisse et Oraison. Ce qui s'est passé dans cette maison, personne ne le sut jamais au juste mais on pouvait facilement le deviner. Rimbaud, qui d'habitude partait toujours à la chasse ou bien était à parcourir ses terres ne quittait plus la demeure. Le long des chemins, à la fontaine, au four comme au lavoir, on ne parlait que du seigneur Rimbaud enfermé avec ses sarrasines. Ce scandale commençait à faire grand bruit dans le pays. Le prieur de l'abbaye de Paillerols décida d'aller parler à Rimbaud. Ce dernier ne voulut rien savoir ni entendre et renvoya le prieur sans aucun ménagement ni égard pour sa personne. On pensa alors que ce pauvre Rimbaud avait été envoûté par ces femmes orientales à la beauté incomparable et qu'elles lui avaient fait perdre la tête par quelque sortilège dont elles avaient le secret. Rimbaud commençait à avoir toute la gent féminine de la noblesse du voisinage contre lui. Ces nobles dames et damoiselles ne comprenaient pas ce qu'il pouvait bien trouver à ces femmes à la peau presque noire. C'était inconcevable ! Il décida une nuit de ramener ses mauresques en cachette de tous dans son château des Mées. Il fut ainsi tranquille pendant quelques jours, le temps que ses gens s'aperçoivent du changement, ce qui ne tarda pas à se produire bien entendu. La situation devint très grave. Les femmes ne passaient plus devant le château sans se signer de peur d'attirer sur elles le malheur. C'est sûr, le seigneur était victime d'un maléfice pour héberger ces femmes sous son toit. Le prieur de Paillerols revint à la charge un nouvelle fois accompagné de son collègue, le prieur de Saint- Michel. Rimbaud exaspéré et hors de lui leur répondit qu'ils feraient mieux d'aller chanter les vêpres et les matines plutôt que de s'occuper des affaires du château. Alors là, pour le coup le prieur de Paillerols faillit s'étouffer de colère et de rage contre Rimbaud. Le menacer de cette façon, c'était outrageant pour lui et il brandit l'arme de l'excommunication. Rimbaud eût bien envie d'envoyer les deux religieux dans la Durance, mais il se ravisa à temps . Il comprit que là il s'attaquait à plus forte partie de lui et qu'il n'arriverait plus à contrôler ses vassaux s'il continuait dans cette voie. Malgré sa peine, car il s'était attaché à ses belles mauresques, il ne put que céder. Alors le prieur, dans le but d'humilier Rimbaud décida d'un stratagème : prendre à témoin toute la population du pays. Il décida donc que le dimanche à venir, les sarrasines seraient conduites à pied jusqu'à la Durance devant tout le pays rassemblé le long de ses rives. Le jour convenu arriva, tout le monde était en bordure du chemin et faisait une haie pour les laisser passer. Les moines de Paillerols et de Saint-Michel étaient un peu plus haut sur la colline. Les lourdes portes du château s'ouvrirent et les sept mauresques apparurent. Tout le monde était sous le choc, on entendit même comme de profonds murmures d'admiration. Les hommes étaient comme hypnotisés. Décidément, qu'elles étaient belles ! Admirables ! Les rumeurs étaient bien fondées ! Les coeurs des moines se mirent à battre sous les scapulaires, leurs yeux étincelèrent. Mais de l'autre côté de la Durance, le Grand Saint-Donat l'ermite de Lure surveillait ses ouailles et comprît ce qui allait se passer. Il fallait agir vite pour préserver les moines du péché. C'est alors qu'il les pétrifia tous sur place dans leur robe de bure. Même le prieur de Paillerols a conservé sur la poitrine sa croix de bois que l'on peut voir encore aujourd'hui accrochée au rocher..."
Source : D'après "Lei pénitents dei Mès" d'Eugène Plauchud - 1897.