Une folle histoire de chapeaux à Nice
Nous sommes entre la fin du XIXème siècle et le début du XXème siècle. Les toilettes des dames aisées sont recherchées et leurs tenues sont toujours accompagnées d'imposantes capelines aux larges bords, garnies de rubans, de plumes, de noeuds, de fleurs, d'objets divers (et même parfois d'oiseaux morts et empaillés entiers). Une première gêne provoquée par ces ornements imposants consistait en le fait que, lors des représentations
théâtrales, des concerts et autres manfestations, les spectateurs assis derrière étaient souvent privés d'une partie ou de la totalité de ce qui pouvait se passer devant eux...
Dans les salles de spectacles et de concerts, il était donc demandé aux dames de retirer leurs chapeaux, (ce qui en temps normal ne se faisait pas et ne se demandait pas).
Or, l'affaire alla plus loin :
Vu l'ampleur que pouvaient prendre ces couvre-chefs et donc, leur prise au vent, il fallait obligatoirement arrimer solidement le tout sur le chignon à l'aide d'épingles et de piques à chapeaux.
C'est ainsi que cela fut l'occasion d'accidents plus ou moins graves : les épingles (pouvant parfois atteindre 20 à 30 centimètres de long) dont la pointe dépassait des chapeaux s'avéraient être dangereuses car elles pouvaient balafrer, griffer ou même crever les yeux des personnes passant un peu trop près !
Les incidents se répétèrent si souvent que des mesures furent prises par les autorités. En voici un exemple avec ce document (Musée du Palais Masséna à Nice).
MAIRIE DE NICE
(Alpes Maritimes)
Nous, Maire de la ville de Nice, Grand Officier de la Légion d'Honneur,
Vu l'article 99 de la loi du 5 avril 1884 ;
Vu l'article 471 paragraphe 15 du Code Pénal
Considérant que la partie acérée des épingles fixant les chapeaux féminin dépasse parfois la coiffure de plusieurs centimètres, sans être munie d'aucun appareil protecteur et que des accidents se sont déjà produits de ce chef.
Considérant que le port d'épingles de coiffure à pointe nue et apparente constitue une menace et un danger pour autrui dans les endroits fréquentés par un public nombreux notamment dans les voitures publiques, tramways et salles de spectacles.
Arrêtons :
Article 1er. - L'accès des voitures publiques, salles de spectacles et de réunions, est interdit aux personnes portant un chapeau que fixent ou ornent une ou plusieurs épingles à pointe apparente, si cette pointe n'est pas munie d'un "cache-pointe" constituant une protection suffisante.
Article 2me. - M. le Commissaire Central de Police est chargé de l'exécution du présent arrêté.
Fait à Nice, le 28 novembre 1912.
Le Maire,
Général F. GOIRAN.
Paire d'épingles à chapeaux avec et sans protection.
Source : D'après un article du blog de Garibondy.over-blog.com ainsi que le document pris en photo par elle-même et la paire d'épingles