Coiffures provençales
"Les femmes de Beaucaire, de Tarascon et d’Arles se distinguent par le mouchoir de mousseline ou de soie, bariolé de vert et de jaune, dont elles entourent leur tête. Elles aiment beaucoup les bijoux : leurs bras sont entourés de bracelets composés de fils d’or plus ou moins gros et auxquels pend un ornement appelé maltaise, parce que c’est une espèce de médaillon en forme de croix de Malte, et une énorme croix de même forme leur couvre presque toute la poitrine. Les plus riches portent des croix à sept diamants. Autrefois, les femmes portaient le drolet : c’était une petite robe très courte partagée en quatre bandes qui descendaient jusqu’au mollet ; et elles se coiffaient d’un petit chapeau noir, bordé de rubans de soie ou de velours. Ce costume gracieux a été abandonné ; il régnait sur toutes les rives du Rhône, depuis Arles jusqu’à Avignon".
Ces observations, notées par Aubin-Louis Millin de Grandmaison** dans le voyage qu’il fit dans le midi de la France, sont celles qu’on pourrait faire encore aujourd’hui. Le savant voyageur déplorait que la plupart des femmes jouissant de quelque aisance eussent renoncé dès lors, dans ce pays comme presque partout, au costume national qui leur seyait si bien. De nos jours, elles sont de plus en plus infidèles aux vieilles moeurs et aux vieilles coutumes ; toutefois, celles qui habitent la Provence et le Comtat Venaissin , si elles ont quitté le petit chapeau dont parle Millin, elles ont conservé du moins la coiffure, plus simple et plus gracieuse, d’origine sans doute beaucoup plus ancienne.
Les coiffures, quoique un peu différentes, se ressemblent en ce qu’elles consistent de part et d’autre en une coiffe rappelant par sa forme ce qu’on est convenu d’appeler le bonnet phrygien, autour de laquelle s’enroule un mouchoir ou un large ruban de velours ou de soie qui la fixe. Cette disposition rappelle la mitra antique et en est peut-être un reste. Ce n’est pas seulement l’Orient qui conserve presque sans changement, comme on l’a dit justement, des vestiges des temps anciens. Pour qui sait les discerner, l’Occident aussi, et notre propre pays, en garde encore des traces aussi peu effacées. (D'après un article paru au XIXème siècle).
** Aubin-Louis Millin de Grandmaison (né en juillet 1759 à Paris - mort le 14 août 1818 à Paris) est un naturaliste mais surtout un "touche-à-tout". Érudit dans de nombreux domaines, il s'intéresse à l'archéologie et à l'histoire de l'art médiéval et classique et fut un bibliothècaire renommé. De 1807 à 18011, il publie "Un voyage dans les départements du midi de la France" en quatre volumes et un atlas. (Source : Wikipédia).