Silence, on tourne dans le Var !
Que se soit en décors naturels ou en intérieurs, en plan large ou en plan américain, le Var a toujours eu de bons rapports avec le cinéma en couleur. Et même, en cherchant bien, la ville de Sainte-Maxime, par le biais de Léon Gaumont, doit avoir joué un rôle important dans les grands évènements de l'industrie cinématographique. C'est en effet à ce génial inventeur parisien mais cependant maximois de coeur, que l'on attribue les premiers procédés de cinéma parlant (1902) et de cinéma en couleur (1912). C'est dans les années 20 que commence la grande aventure cinématographique avec le célèbre "Napoléon" d'Abel Gance.
Plus tard elle se poursuit avec un magnifique duo. Deux chefs-d'ouvre, tournés la même année en 1938, l'un à Toulon, "L'étrange Monsieur Victor" de Jean Grémillon et l'autre au Castellet, "La femme du boulanger" de Marcel Pagnol. La vedette de ces deux films cultes n'est autre qu'un monstre sacré, un enfant du pays : Jules Muraire dit Raimu, le Toulonnais. Par la suite, le département sera à nouveau mis à contribution pour enrichir une filmographie dans laquelle le pire côtoie le plus souvent le meilleur. A Saint-Tropez, les cinéphiles nostalgiques de la nouvelle vague préfèrent se souvenir du film de Vadim et de ses symboles et faire semblant d'oublier que la série des gendarmes a effectué un joli parcours commercial à travers le monde et qu'elle a immortalisé un bâtiment abritant une gendarmerie que tous les touristes viennent photographier.
A l'écart des plages du littoral, les plus petites communes de l'arrière-pays varois ont prêté leurs places et leurs ruelles à de nombreuses productions. Mais à moins de pouvoir faire un arrêt sur image, il convient d'avoir un oeil averti si l'on veut essayer d'identifier les villages en question dans des plans qui ne durent parfois que quelques secondes. Une séquence de "L'arbre de Noël" réalisé par Terence Young avec Bourvil et William Holden se situe à La Martre.
Dans "Le cerveau" de Gérard Oury, la voiture dans laquelle ont prit place Jean-Paul Belmondo, David Niven et Bourvil traverse à fond un village où la foule en liesse est censée fêter le 14 juillet. Seuls les habitants de Bargemon savent que c'est le leur et que ce n'était d'ailleurs pas le jour de la fête nationale. La scène qui dure moins d'une minute dans le film a été reprise plus de vingt fois avec une centaine de figurants amusés de cette expérience. La commune de Brenon a servi de décord pour certains plans des "Seins de glace" de Georges Lautner.
Dans "Les spécialistes" de Patrice Leconte, Bernard Giraudeau et Gérard Lanvin effectuent quelques belles acrobaties sur la rive gauche des gorges du Verdon offrant au public des vues époustouflantes du canyon. Au cours du "Voyage en douce" de Michel Deville, Géraldine Chaplin et Dominique Sanda profitent d'une de leurs étapes provençales pour flâner sur le marché de Draguignan. Jusqu'à l'ancien village de Brovès déserté depuis son annexion au camp militaire de Canjuers, qui a vécu sa deuxième mort lors du tournage du film de Maroun Bagdadi "Hors la vie". Avec un minimum d'artifices, les façades borgnes des maisons provençales ont offert l'image de désolation d'un quartier de Beyrouth dévasté par la guerre. Certains figurants locaux qui avaient bien connu le village avant qu'il ne soit officiellement rayé de la carte, n'ont eu aucune difficulté à afficher le masque de la résignation et de la douleur propre aux populations des pays en conflit quasi permanent.
Dans une note plus optimiste, c'est un village tout entier, rebaptisé Espigoule pour l'occasion, qui a participé à la truculente comédie de Christian Philibert, "Les 4 saisons d'Espigoule". Le village existe bel et bien puisqu'il s'agit de Ginasservis, dont les élus, les habitants, les commerçants et les figures locales ont été mis à contribution pour interpréter leurs propres rôles. Dans la catégorie des "remake", c'est le village d'Artignosc sur Verdon qui a été retenu pour y tourner une partie des scènes de la nouvelle version télé de "La femme du boulanger" avec Roger Hanin.
Depuis "L'entrée du train en gare de La Ciotat", le premier film à sensation tourné par les frères Louis et Auguste Lumière en 1895, aux dernières séries télévisées en date, telle "Plus belle la vie" dont l'action se passe à Marseille, la Provence en général et le Var en particulier ont servi de cadre à une centaine de chefs d'oeuvre du cinéma français et étranger, sans compter les autres feuilletons et sitcoms tournés chaque été dans les stations du littoral.
Source : Couleurs du Var - Morceaux choisis - Edité par le Conseil général pour le supplément du Conseil général Var Magazine - Année 2000.