La chapelle Notre-Dame de Grâces à Cotignac
Le 10 août 1519, la Vierge entourée de saint Michel, saint Bernard et sainte Catherine apparut à Jean de la Baume, bûcheron de Cotignac et lui demanda de construire sur le mont Verdaille, une chapelle. Elle promit d'accorder de nombreuses grâces à ceux qui viendraient y prier. L'apparition se renouvela le lendemain, et les villageois entreprirent aussitôt la construction d'un premier sancturaire dont le maître-autel devait s'élever à l'encroit même où la Vierge était apparue. Les pèlerins accoururent de toutes parts et dès 1524, la communauté décida de construire une "chapelle plus grandiose devant contenir plus de peuple". Elle était ornée de nombreuses statues dont celles de la Vierge, de saint Bernard, de sainte Catherine et de saint Michel, et d'un tableau de la Vierge à l'Enfant. C'est pour desservir cette chapelle que fut fondée la première communauté de l'Oratoire en 1586.
Après vingt-trois ans de mariage, Louis XIII et Anne d'Autriche n'ayant toujours pas d'enfant, le trône de France restait sans héritier. Après six ans de prières, le Frère Fiacre, moine augustin déchaussé de Paris, obtient enfin une réponse céleste : le 3 novembre 1637, la Vierge lui apparut trois fois revêtue d'une robe blanche semée d'étoiles d'or portant un enfant dans les bras et lui dit : "Cet enfant est le dauphin que Dieu veut donner à la France". Elle lui apparut une seconde fois sans parler, puis vers quatre heures du matin, une troisième fois et lui donna l'assurance que son voeu serait exaucé. Elle ajouta qu'elle apparaissait telle qu'elle était représentée sur un tableau que l'on voyait au maître-autel de Notre-Dame de Grâces à Cotignac. Elle prescrivit en outre qu'Anne d'Autriche fit procéder à trois neuvaines : la première à Notre-Dame de Grâces, le seconde à Notre-Dame de Paris, la troisième à Notre-Dame des Victoires, couvent où Denis Antheaume s'était retiré le 20 mai 1632 sous le nom de Frère Fiacre. Ce dernier commença ses neuvaines le 8 novembre 1637 et les termina le 5 décembre 1637. Louis "Dieudonné" naquit le 5 septembre 1638 exactement neuf mois après. Frère Fiacre voulant vérifier si la Vierge de ses apparitions était bien celle du tableau de la chapelle, se rendit à Cotignac en février 1638 accompagné de son supérieur le Père Jean Chrysosthome. Il reconnut immédiatement le tableau de sa vision et après avoir accompli sa neuvaine, regagna Paris. Le 10 février 1638, Louis XIII consacra par voeu son royaume à la Vierge et ordonna que chaque année, le jour de l'Assomption, "il serait dit grand'messe dans toutes les églises et effectué une procession générale à laquelle devaient assister les parlements, les cours souveraines, les corps constitués et les principaux officiers des villes". Après la mort du Roi, Anne d'Autriche devenue régente du royaume, fit exécuter un grand tableau représentant Louis XIV à genoux devant la Vierge à laquelle il offre sa couronne et son sceptre. Le Frère Fiacre et le Père Victor arrivèrent à Cotignac en juillet 1644 nantis du tableau qui fut détruit pendant la Révolution.
Fresque à Carcès représentant l'arrivée de Louis XIV à Cotignac en 1660 (Photo Nadine)
Le 21 février 1660, Louis XIV et sa mère ainsi que le cardinal Mazarin furent accueillis par le clergé local au bas de l'escalier qui porte aujourd'hui son nom. En 1661, Frère Fiacre revint à nouveau à Cotignac : après le traité des Pyrénées et son mariage avec Marie-Thérèse d'Espagne, le Roi tint à manifester sa reconnaissance à Notre-Dame de Grâces. Il chargea le moine de remettre en son nom à la Vierge le traité et son contrat de mariage. Ces deux documents, reliés en un seul volume en maroquin rouge et tranche dorée, richement armorié, imprimé en 1660, sont aujourd'hui conservés à la bibliothèque de Draguignan. En 1667, un ex-voto de marbre noir rappelle ces grandes dates. Le Frère Fiacre mourut en 1684, à soixante-quinze ans et conformément à son testament, son coeur enfermé dans un coffret d'étain fut enseveli dans la chapelle. "Il est arrêté de toute éternité que l'on prendra mon coeur après ma mort, on le mettra dans un coeur d'étain et deux religieux de Notre-Dame le porteront aux pères de l'oratoire de Notre-Dame de Grâces pour y être posé sous les pieds de la Vierge. Et je prie ceux qui tireront mon coeur de mon corps de le tirer par le côté, à cause de la pudicité religieuse". En 1876, au cours de travaux de restauration, on retrouva un coeur en plomb, mais le contenu avait disparu. Pendant la Révolution, des villageois l'avaient mis en lieu sûr, ainsi que l'ex-voto de marbre noir, la statue miraculeuse et le tableau des apparitions. C'est dans cette chapelle que s'est joué au XVIIe siècle le destin de la France. Ce dauphin attendu comme le Messie, considéré comme un don de Dieu, a un jour montré au monde sa face rayonnante : il fut le Soleil de son siècle.
Source : D'après Le Var des collines - Edisud.