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Passion Provence
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  • Bienvenue chez moi à Trans en Provence dans le Var. Je vous invite à la découverte de la Provence et du Var en particulier à travers son histoire, son patrimoine, ses traditions, ses coutumes, ses légendes, etc...
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4 avril 2023

Le chiffonnier ou estrassaire

metier_de_chiffonnier

En provençal, estrasso signifie loque, vieux linge, étrasse, rebut et le verbe estrassa, déchirer, gaspiller. Comme tous les marchands ambulants, le chiffonnier ou estrassié mais encore estrassaire parcourait inlassablement les villes et les villages du Var et des Alpes-Maritimes, avec un sac à l'épaule ou avec une charrette tirée par un âne. Il allait de maison en maison à la recherche de guenilles en criant : "Estraissaire, chiffonnier !" Maddy de Draguignan se souvient : "L'estrassaire passait tous les quinze jours avec sa petite voiture tirée par un âne gris. Il collectait tout : les estrasses, les bonnets de feutre, le linge de maison en lin ou en chanvre. Mais il avait une préférence pour le coton qui était plus facile à vendre aux moulins à papier de Sorgues ou de Malaucène (Vaucluse). Il prenait aussi les vieux papiers, les bouchons de liège, les clous, le verre cassé, les os de cuisine pour faire de la colle ou du suif ainsi que les peaux de lapin pour la confection des chapeaux de fourrure. Il criait à tue-tête : "Dames d'en-bas, dames d'en-haut, descendez vite car je ne monte pas ! Ma mère discutait avec lui devant la porte et moi, je regardais fascinée, son barda par la fenêtre !" Quand il posait sa charrette, quelques portes s'ouvraient et les ménagères, les bras chargés de sacs de vieilles nippes ou d'une caisse pleine de ferraille, allaient à sa rencontre. Il les accueillait avec son peson à la main pour estimer le poids de la marchandise et les payait de quelques pièces de monnaie. Il allait jusqu'à récupérer les cheveux qu'il vendait aux coiffeurs... Il freudonnait alors : "Ne pleurez pas vos cheveux tombés, le chiffonnier les revend au coiffeur. Si vous devenez chauve, si la coquetterie vous pousse à cacher votre calvitie, vos anciens cheveux vous seront restitués sous forme de perruque...". Dans les villes portuaires comme Toulon ou Nice et dans les ports de pêche tels Saint-Tropez ou Cagnes, l'estrassaire amassait principalement les cordages et les voiles hors d'usage. Des matières très recherchées et payées même très cher, car elles servaient à la fabrication du papier à cigarettes.

Chiffonnier

L'estrassaire n'avait pas bonne réputation et on s'en méfiait. Et pourtant pour exercer son métier il avait besoin de plus d'honnêteté que personne. Il était souvent la providence des objets perdus, la dernière personne à qui s'adresser avant de recourir à saint Antoine de Padoue. Si, par inadvertance, vous jetiez portefeuille, bijoux ou cuillères en argent dans le seau à ordures, le lendemain matin, il y avait de grandes chances pour que le chiffonnier vous les rapporte. Dans le journal illustré "La joie de la maison" paru en 1899, on peut lire : "Parmi les récompenses accordées par la préfecture de police pour actes de probité figurent bien souvent des chiffonniers. Sait-on ce que gagnent ces pauvres bougres ? Ils arrivent au plus à trois francs par jour. Pauvre et honnête, tous le chiffonnier est là !" Ce métier a été exercé en France jusque dans les années 1960 et continue à l'être dans de nombreuses régions du monde. A partir des années 1970, les habitudes de consommation ont considérablement évolué avec l'apparition de la grande distribution et le ramassage des ordures qui s'est généralisé dans tous les pays d'Europe.

 Source : D'après un article de Nelly Nussbaum paru dans le supplément du journal Varmatin et arrangé par moi-même.

Chiffonnier dans sa cour

Complément

Le chiffon n’entre pas seulement dans la composition de certains papiers. Le chiffon de laine sert à la fabrication des tissus. Quand il arrive dans l’usine où il va être utilisé, il est d’abord soigneusement lavé, puis il passe à travers des machines appelées effilocheuses, qui ont pour fonction de défiler la laine. Après cette opération, il est trempé dans un bain d’acide qui détruit totalement le coton et ne laisse que la laine. Cette laine est ensuite cardée et forme le fil qui sera employé à la fabrication des tissus. Pour les chiffons de laine comme pour les chiffons de toile, ce sont les neufs qui ont le plus de valeur. Voici quelques prix qui donnent une idée de la minutie avec laquelle ils doivent être triés : les rognures de flanelle valent 3 francs le kilo ; les rognures d’étoffes diverses recueillies chez les couturières valent 70 centimes le kilo ; enfin les rognures qui sortent de chez le tailleur valent 80 centimes. Si les rognures sont vieilles, elles varient de 180 francs les 100 kilos pour les blancs fins à 8 francs les 100 kilos pour les alpagas vieux. Rien n’est plus intéressant que d’assister au classement de ces diverses matières chez le marchand de chiffons. Toutes les sortes sont réparties suivant leur destination en d’immenses casiers. On peut voir ainsi, à côté d’un casier où sont contenus dix mille kilos de pantalons de soldats, un autre casier qui renferme dix tonnes de chaussettes noires ou blanches. Le marchand de chiffons a des employés qui arrivent à classer les chiffons pour ainsi dire au toucher, ces employés n’ont besoin d’ouvrir les yeux que parce qu’il faut grouper les chiffons par nuances. Mais l’on ne peut s’imaginer le nombre infini de sortes que l’on établit ainsi dans ces magasins. En moyenne le chiffon de laine se vend trente-cinq francs les cent kilos, la moitié moins que le chiffon de papeterie.

Expression

"Se battre comme des chiffonniers" est une expression qui signifie "se disputer violemment".  Explication : Dans les temps anciens où le papier était exclusivement fabriqué à base de chiffes (chiffons, textiles), le chiffonnier ramassait les vieux chiffons pour les vendre aux papetiers. La langue française a retenu l’expression pour décrire l'action de se disputer, voire de se battre, d’une manière âpre et bruyante tant le gain qui pouvait découler d’une bonne prise de chiffons déterminait la survie de chacun.

Petits-metiers

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Commentaires
L
votre article m'a rappelé les histoire de ma Grand Mère paternelle . Car dans la Drôme on entendait " chiffonnier , peaux de lapins etc) Laurence
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M
Ce métier n'existe plus maintenant? Je me fascine toujours à voir les choses du passé. La façon dont l'auteur raconte est tellement passionnante que l'on a envie de vivre dans ces moments.
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A
Si je prononce le mot " estrasse " ici ils vont tous me dévisager,pourtant je l'emploi assez souvent !!!!
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L
Bonne fin de semaine, très intéressant article, d'un temps appartenant au passé..... <br /> <br /> bien amicalement.
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A
Une autre expression très employée dans le temps :<br /> <br /> <br /> <br /> "s'estrasser de rire "
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C
Ma maman était couturière e(donc les bouts de tissuselle en avait !) et j'ai entendu parler lorsque j'étais toute petite de l'estrassaire comme du remouleur auquel ma mère confiait ses ciseaux. Toute une époque merci pour cette balade dans le temps passé. Biz Lyne
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G
Superbe page. Merci Nadine pour ce bien beau partage. Beau retour sur ces coutumes et vieux métiers. Maman et ma grand-mère évoquaient aussi souvent les passages de "l'estrassaire". Mot qui faisait beaucoup rire l'enfant que j'étais ..<br /> <br /> <br /> <br /> Bonne fin de semaine<br /> <br /> Pensées chaleureuses<br /> <br /> Giselle
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V
je ne connaissais pas..merci pour la découverte!comme quoi, le recyclage n'est pas une nouveauté. gros bisous Nadine. cathy
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