Régusse... et leurs ailes tournent
Régusse et ses moulins ruinés sur la gauche (Carte postale ancienne)
Le 3 août 1996, un grand nombre de personnes font le déplacement jusqu'à Régusse, village du Haut Var, pour assister à l'événement : l'inauguration des moulins situés au sud du village qui ont été restaurés. Sont présents Monsieur Hubert Falco, sénateur, alors président du Conseil général, Monsieur Farhner, architecte des Bâtiments de France, Monsieur René Roux, maire de Régusse et de tous les officiels. Sur les ailes, les voiles tendues s'offrent au vent. A l'intérieur, les meules se mettent à tourner, et c'est un métier disparu qui reprend vie. Celle des meuniers de Provence, tel maître Cornille, raconté par Alphonse Daudet.
Mais en réalité, c'est bien plus tôt que commence l'histoire de ces moulins. Le premier, le plus proche du village, a été bâti au XIVème siècle par les Templiers. Le second est érigé un siècle plus tard, alors que la commune est la propriété de la seigneurie Dalbert. Viendront ensuite les Castellane puis les Grimaldi, dont la présence à Régusse reste gravée sur le blason de la commune. Jusqu'à la Révolution, les moulins, propriété des seigneurs, servent à moudre le blé de l'ensemble des cerfs établis sur une distance d'une lieue autour du village. Après la Révolution, ils deviennent privés. Témoins d'une activité passée, ils fonctionnent jusqu'à la moitié du XIXème siècle. On y moud alors, tous les ans, pas moins de cinquante tonnes de grains. Puis, concurrencés par la minoterie industrielle, ils perdent leur utilité. Peu à peu ces bâtiments tombent en désuétude et ils finissent en ruines. De ces beaux moulins, il ne reste que les deux tours. Délabrés et inutilisables, ils suscitent l'intérêt de la municipalité qui, au début des années 90, décide de lancer une campagne de restauration. Un bail emphytéotique de 99 ans est alors signé entre la municipalité et le propriétaire. Dans un premier temps, un débroussaillage des terres autour des moulins a lieu afin de les rendre accessibles. Puis, vient ensuite une phase d'études : un long travail de recherches est entrepris. Grâce au concours de l'architecte des Bâtiments de France, l'équipe en charge du projet récupère des plans d'origine de moulins type de Provence, datant de 1640. Un déplacement est même organisé à Fontvieille dans les Bouches-du-Rhône, pour visiter le moulin dit Moulin de Daudet. Ces investigations et observations servent de bases à la reconstruction des vestiges meuniers de Régusse. Pour le savoir-faire, la restauration du mécanisme, de la charpente et du toit, ce sont les "Charpentier du Haut-Var", au Muy, dont le gérant, Monsieur Aujogue est un ancien "Compagnon charpentier du tour de France" qui ont oeuvré à la reconstruction.
La charpente - Vue à l'envers (Photo du dossier)
Les moulins de Provence sont reconnaissables grâce à leurs mensurations. Leur diamètre est égal à leur hauteur : six mètres. Au dessus de la tour est simplement posé le toit, plus précisément nommé chapelle, qui a été reconstruit en cèdre rouge. A l'époque c'était du châtaignier, mais là, il était important d'utiliser du bois imputrescible pour cette pièce maîtresse du moulin. La chapelle pèse 5,2 tonnes. Pour la faire pivoter et orienter les ailes aux vents, la force de huit personnes est nécessaire. A l'intérieur de cette pièce maîtresse, est fixé l'arbre principal, un morceau de chêne long de sept mètres et pesant pas moins de 800 kg. Mis en rotation, il entraîne la grande roue et donne le mouvement à l'ensemble du mécanisme.
Vue du mécanisme avec axe et grande roue (Photo du dossier)
A Régusse, ce savoir-faire perdure grâce à quelques bénévoles, qui, régulièrement, font tourner le moulin. Lors de la fête qui leur est dédiée, le premier week-end du mois d'août, des Journées européennes du patrimoine (21 et 22 septembre 2019) et à bien d'autres occasions tout au long de l'année, ils parent les ailes de leurs voilages avant de les actionner. Le grain est alors transporté jusqu'à l'étage du moulin avant d'être broyé entre les meules. Sous les yeux émerveillés des petits comme des grands, le blé devient boulange. "Ici, nous avons entre 220 et 240 jours de vent par an", précise Alain Gasquet. "Cela laisse à penser que ces moulins tournaient très régulièrement. Le reste du temps, le meunier s'occupait de leur entretien". Sur les deux bâtiments restaurés, tous deux inscrits à l'inventaire des Monuments historiques depuis 1978, un seul a bénéficié de la remise en état de son mécanisme. Le second a été converti en musée. On y trouve divers outils agricoles et quelques photos anciennes du village.
Je mets le lien ci-dessous pour que vous puissiez aller voir le site des amis des moulins de Régusse.
Les Amis des Moulins de Régusse (lesamisdesmoulinsderegusse.fr)
Source : D'après un article paru dans le magazine Le Var - Eté 2019 - Nul Var Ailleurs
Les moulins à vent de Régusse (Photo Nadine)
Les moulins dans le soleil couchant (Photo Nadine)