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Passion Provence
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  • Bienvenue chez moi à Trans en Provence dans le Var. Je vous invite à la découverte de la Provence et du Var en particulier à travers son histoire, son patrimoine, ses traditions, ses coutumes, ses légendes, etc...
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16 septembre 2024

La maison provençale (l'oustau)

Bastide

 

Dans le Var, les maisons de campagne ne sont pas désignées comme des mas mais comme des bastides, des ménages, des "oustau". L'habitation d'un paysan, malgré l'évolution rapide des mœurs après la dernière guerre, s'est peu transformée, extérieurement tout au moins. Le progrès est entré dans la cuisine mais beaucoup de bastides sont restées telles qu'au siècle passé, d'autres sont à l'état de "casau" (masure abandonnée) que l'on trouve dans les vallons et dont ne subsiste souvent qu'une partie des murs recouverts de lierre. Sur le devant pousse un vieux figuier ou d'antiques mûriers, parfois deux ou trois cyprès un peu funèbres mais typiques du paysage provençal (le nombre de trois était signe d'hospitalité). L'habitat, selon les périodes, se déplace car l'insécurité poussait à se réfugier en hauteur derrière les murailles et les remparts de défense autour des châteaux qui étaient plus sécurisants que l'isolement dans la campagne. Au village, en raison du manque d'espace, les maisons sont serrées les unes contre les autres, sont hautes, sur deux ou trois niveaux et assez austères. Le rez-de-chaussée comporte une remise, on accède au premier étage par un escalier raide d'une seule volée, et comporte la cuisine et une seconde pièce souvent sans fenêtre "la chambre soume" (sombre). Au deuxième niveau, on trouve une grande chambre et un grenier ou fenière (fenil). Sur le palier caché par un rideau l'indispensable seau hygiénique. Quand la sécurité fut à peu près certaine au XVIIIème siècle, la population eut le désir d'espace, besoin d'air libre et les villageois construisirent alors dans la plaine ou les vallées, des "ménages" c'est-à-dire, des maisons groupées en hameaux et entourées d'un jardin, potager ou verger au milieu des terres appartenant aux habitants de la maison. Nombre de ces ménages sont, de nos jours, en ruines couverts de lierre et de ronces. Du temps où ils étaient habités, à l'ombre fraîche d'un figuier ou des mûriers taillés en ramade, on mangeait dehors au frais. Il y avait un puits duquel on tirait l'eau avec un seau pendu par une grosse chaîne à un réa grinçant. Cette eau irisait le pastis fabriqué à la maison avec de l'eau de vie et de l'anis blanc auquel on ajoutait un petit verre de Fernet Branca, quelques feuilles d'absinthe et un peu de sucre. La bastide est massive, les murs épais, en pisé ou terre argileuse mêlée de chaux et de cailloux. La porte est basse, les fenêtres inégalement percées, fermées l'été pour empêcher la chaleur d'entrer (toutes les ouvertures sont petites par économie et besoin de fraîcheur). Jamais il n'y en a sur la face nord, la façade principale est toujours tournée au midi, sur certaines on a peint un cadran solaire pour lire l'heure. Les toitures couvertes de tuiles canal demi-rondes ou trapézoïdales sont à faible pente pour minimiser la prise du mistral. On posait dessus de grosses pierres car il arrivait qu'elles s'envolent arrachées par les terribles bourrasques de vent. Le rez-de-chaussée est occupé par l'écurie, l'étable, la cave ; souvent sans fermeture, on y abrite les gros outils, les araires, herses, sulfateuses, échelles... A côté, la lourde porte de l'appartement n'est presque jamais fermée, un rideau de toile de jute en interdit l'entrée aux mouches. Un sombre corridor va jusqu'au pied de l'escalier desservant l'étage, le sol est carrelé en pieds carrés en argile plus ou moins teintée.

 

Veillée

 

Sur un côté, une grande cuisine servant de salle où l'on prend les repas, est au cœur de la maison. Dans l'âtre d'une immense cheminée brûlent tout le jour et toute l'année de grosses bûches ; le soir on couvre les braises avec des cendres et le matin on les retrouve encore chaudes quand on y jette une gavelle (fagot de sarments secs). Les flammes renaissent et lèchent joyeusement le chaudron de fonte pendu au "crémasclé" (la crémaillère). La soupe y cuit pendant des heures, elle a d'ailleurs toujours un petit goût de fumée. Un "potager" aux carreaux rouges vernis et usés, garni d'un gros tian d'argile cuite dans lequel on fait la vaisselle avec l'eau amenée du puits dans les seaux de fer galvanisés ou des cruches en poterie vernie. Devant l'âtre, on fait le samedi des ablutions assez sommaires. Les murs et les plafonds hauts patinés par la fumée sont passés au lait de chaux de loin en loin, les poutres en chêne équarries grossièrement sont blanchies en même temps. Des papiers gluants de miel sont pendus au plafond pour attirer les mouches qui s'y collent. Une longue table tient le milieux de la pièce, parfois elle est recouverte d'une plaque de zinc, cela économise la toile cirée et le nettoyage est plus facile. La bouteille de vin y siège en permanence. Le couvert est mis : des assiettes profondes et sans rebords, genre écuelles pour la soupe, des couverts de fer rétamés une fois par an, tout est simple. Le soir, la lampe à pétrole ou à huile anime la maison. Le domestique, quand il y en a un, s'assoie à cette table avec les maîtres, et part ensuite coucher à la fenière, où il monte bien souvent par une échelle, il dort enroulé dans une simple couverture. Beaucoup de cadets de familles paysannes se plaçaient ainsi, des garçons ne possédant rien ou ayant mené une vie déréglée, démunis de tout, venaient demander dans les fermes du travail et un abri, parfois c'étaient des trimardeurs à qui l'on ne demandait rien, que leur nom, ils y demeuraient parfois jusqu'à leur mort.

 

Veillée en Provence

 

L'hiver, devant l'âtre, à la lumière du feu on veillait, les femmes tricotaient chaussettes ou couvertures de coton blanc, les hommes bavardaient. On monte l'escalier raide pour aller aux chambres et à la magnanerie. Les plafonds sont faits de canisses enduites de plâtre épais. On s'éclaire à l'aide de petites lampes à huiles au corps de verre, au ventre rempli d'huile, surmontées d'une mèche brûlant avec une flamme vacillante, souvent c'était à la bougie qu'on s'éclairait dans les chambres où l'on n'allumait jamais le feu. On emportait une tomette, un fer en fonte ou simplement un gros caillou chauffé dans l'âtre, enveloppé d'un chiffon, et on le plaçait au fond du lit, et pieds chauds, on dormait très bien. Le lit ne comportait qu'une paillasse posée sur des planches. Dans les maisons proches du rivage, le varech remplaçait la paille. Dans la chambre du maître de maison, sur la table de toilette trônent une cuvette et un broc de faïence fleuri, qui ne servent que de décor, puisqu'on se débarbouille à la cuisine. Sur la commode rustique, un bouquet de fleurs d'oranger de la mariée protégé par un globe de verre. De chaque côté, un vieux daguerréotype fané dans un cadre de bois taillé à la main. Au chevet du lit, un crucifix, un brin de buis ou d'olivier béni, le cierge de la Chandeleur éléments qui constituent une protection contre les misères de la vie. Une garde-robe à deux portes en bois fruitier, deux chaises et c'est tout ! Mais si le plancher est carrelé de tomettes rouges, la provençale aura à cœur de l' entretenir bien ciré. Il y a toujours quelques cafournons (pièces sombres) pour servir de débarras. Sur le palier est placé un seau hygiénique dont on jette chaque jour le contenu dans la suie (fosse à purin) derrière ou à côté de la maison. cette fosse recueille tous les déchets et tous les excréments humains, animaux, mêlés à la paille des litières, tout cela donnait un bon engrais, le seul, qu'on dit biologique maintenant.

 

Cabane au fond du jardin

 

Au fond du jardin, une cabane de planches dans laquelle une petite estrade sert de "cagadou" dans la journée, une jarre d'argile reçoit les déjections et souvent ce n'est seulement que de la sciure de bois qui couvre le sol. La vie se déroulait bien simplement dans ces bastides perdues.

 

SourceD'après le livre "Les Maures, terre de Provence" de Georgette Brun-Boglio - Les Presses du Midi à Toulon

 

 

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Commentaires
K
Bonjour Nadine,<br /> <br /> Connaissez-vous l'origine de la coutume des 3 cyprès de l'hospitalité ? On m'a raconté quelque chose, mais je n'en ai jamais eu la preuve formelle, ni la moindre relation écrite, toute juste cette tradition orale. Cela remonterait aux hérésies cathare ou vaudoise. Les hérétiques marchaient vers l'Est, où ils pensaient trouver paix et sécurité pour exercer librement leur foi. Leur long chemin d'exil, qui pouvait durer plusieurs générations, était jalonné de refuges, où ils pourraient trouver le boire, le manger et le coucher. Ces maisons étaient signalées par 3 cyprès que l'on voyait au loin. Dans ma maison du Revest, il y avait 3 cyprès géants qui gardaient l'entrée. Je les ai fait couper, non par manque d'hospitalité, mais pour cause d'allergie !<br /> <br /> Si vous pouviez trouver des traces de l'origine de la coutume ...<br /> <br /> Katryne
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A
Superbe cette photo de la Maison provençale ou l'oustaou ! <br /> <br /> Belle et bonne journée !<br /> <br /> Gilbert
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P
Bonjour Nadine<br /> <br /> Je n'interviens pas souvent, mais merci pour tous tes articles.<br /> <br /> Je me régale...<br /> <br /> Bises<br /> <br /> Philou
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