Arbre sacré, arbre emblématique de la Provence éternelle, arbre de vie qui sait s'adapter aux sols les plus ingrats et nourrir de ses fruits les populations les plus pauvres, l'olivier est aussi l'arbre de la persévérance. Durant les cent dernières années il a affronté tant d'épreuves qu'il aurait pu tout aussi bien disparaître totalement du paysage varois comme s'il en avait été brusquement effacé par le coup de pinceau rageur d'un Van Gogh brouillé avec la Provence. Alors qu'il vivait prospère dans le premier département oléicole de France, que des fontaines d'huiles odorantes aux couleurs du soleil s'écoulaient chaque hiver des rivages de la Méditerranée aux contreforts montagneux de Mons, l'apparition de l'huile d'arachide en 1843, celle de palme sous le Second Empire puis celle de toutes les graines oléagineuses, lui portent une première estocade. A partir de 1900, il subit l'offensive de la vigne. D'un meilleur rendement, elle grignote inexorablement les bonnes terres qui étaient autrefois dévolues aux oliviers. Une première vague de froid péniblement surmontée en 1929 et une seconde terrible en 1956 (le département entier est paralysé par le gel) laissent l'oliveraie varoise exsangue. 

Article du journal La Provence du 2 février 2017 : "Qui se souvient du 2 février 1956 qui a gravé la mémoire des anciens ? Après un mois de janvier anormalement clément, ce jour-là, la température est passée en quelques heures seulement de +12 °C à -10 °C. Deux jours après, 80 centimètres de neige recouvraient la Provence toute entière et le thermomètre continuait à descendre jusqu'à atteindre à certains endroits -18 °C et même -25 °C. Un mistral cinglant soufflait. Le linceul blanc tombé du ciel s'est maintenu tout le mois de février et la vie des gens des campagnes s'en est trouvée complètement chamboulée. Plus d'eau courante dans les maisons mal isolées, des routes impraticables, des classes fermées, plus de circulation de marchandises, des difficultés de ravitaillement. De nombreux témoignages de ce cataclysme météorologique font état de conduites d'eau explosées, de chauffage en panne et d'un manque de pain. Pendant près d'un mois les températures se sont maintenues bien au-dessous de -10° affectant la vie quotidienne des provençaux."

Reprise du texte : Aussi solide soit-il, l'olivier ne supporte pas les grands froids et surtout pas des températures qui dans certains endroits sont descendues au-dessous de moins 30°. Les lourdes meules de pierre des moulins s'arrêtent une à une de tourner, les rouages de bois se figent dans un dernier grincement plaintif et dans les campagnes, le mistral siffle rageusement à travers les branches noircies des arbres morts. La logique aurait voulu que les rares survivants finissent en arbres d'ornement dans les parcs et les jardins avec juste ce qu'il faut de protection pour que l'espèce ne s'éteigne pas complètement. Les Varois ne l'ont pas vu de cet oeil. Comment d'ailleurs auraient-ils pu imaginer se couper ainsi radicalement de leurs racines ? Au lendemain d'un désastre qui en avait ruiné plus d'un, les oléiculteurs et les petits propriétaires avec des aides financières et techniques pour certains, et les moyens du bord pour les autres, tous se sont employés, chacun à son niveau, à reconstituer l'oliveraie varoise. Ici, on recèpe, là on retaille les vieilles souches qui se refusent à mourir, ailleurs on replante comme si l'avenir d'un département tout entier était tributaire de la survie d'un arbre. A partir de 1960, dans les communes de Mons, Fayence, Callian, Seillans, Bargemon, Claviers, Callas, Montferrat, Draguignan, Trans en Provence, La Motte, Les Arcs, Aups, Entrecasteaux, Cotignac, Varages, Tourves, Ollières, Pourcieux, etc... c'est par centaines d'hectares que les oliviers reverdissent lentement. Dans les moindres petites propriétés, les moindres petits vergers, les agriculteurs, tous sans exceptions mettent un point d'honneur à soigner leurs oliviers et à les rendre à nouveau productifs. En marge des critères purement économiques, les témoins directs de cette époque affirment que l'olivier doit surtout son regain de jeunesse à un formidable sursaut sociologique et culturel de la part d'une population qui s'est sentie touchée au plus profond de ses traditions. Cette mobilisation n'a certes pas permis aux propriétaires de retrouver le niveau de production d'antan, mais elle a suffi à relancer l'oliveraie varoise sur de nouvelles bases avec, en prime, un label de qualité qu'elle ne possédait pas auparavant. Les plans de soutien, aidés par le Conseil général, qui épaulent depuis six ans les créations de plantations, commencent néanmoins à porter leurs fruits. Selon les recensements effectués par la Chambre d'agriculture, le département compte actuellement (texte écrit en 2000) 600 000 à 700 000 oliviers représentant une surface d'environ 4 000 hectares en production. Ces chiffres prennent en compte, de manière indifférenciée, les plantations à vocation agricole et les plantations ornementales. Ils traduisent cependant toute l'importance du renouveau. En 1992, avec une production exceptionnelle de 500 tonnes d'huile, le Var a même réussi à regagner son rang de premier département oliécole français.

Source : Couleurs du Var - Morceaux choisis - Conseil général du Var - Supplément à Conseil général Var magazine - Décembre 2000

Je vous mets ci-dessous les liens de quelques articles du blog traitant des oliviers.

L'olivier, arbre éternel et élixir de jouvence - Passion Provence

L'olivier sauvage fait son apparition sur Terre à la Préhistoire, puisqu'on a trouvé en Crète des feuilles d'oliviers fossilisées datées de 37 000 ans. La culture de l'olivier aurait débuté en Crète entre 5 000 et 3 500 ans avant J.C. pour se répandre ensuite tout autour des pays de la Méditerranée.

http://www.passionprovence.org

Notes sur les gelées des oliviers - Passion Provence

J'emprunte ce qui suit à la "Collection des Mémoires ou de Lettres relatives aux effets, sur les oliviers de la gelée du 11 au 12 janvier 1820 (Paris, 1822)".

http://www.passionprovence.org

Les moulins à huile dans le Var - Passion Provence

En 1844, on compte 485 moulins à huile dans le département du Var. "Le moulin à huile se compose de trois parties : 1/ La salle d'extraction, où se trouvent le broyeur, la presse, l'appareil à eau chaude et les enfers.

http://www.passionprovence.org